Critique de la démocratie athénienne
"Nous ne sommes pas en démocratie" est une des phrases les plus répandues, notamment par la gauche dite 'dissidente', à la tête de laquelle nous trouvons Etienne Chouard ainsi que beaucoup d'autres. Donc, tous nos problèmes actuels viendraient de l'absence de démocratie, de l'absence d'une réelle égalité entre les citoyens.
Le modèle de la "vraie "démocratie serait donc à chercher du côté d'Athènes au 5è siècle av JC, épicentre du monde Antique.
Mais qu'en est-il réellement de cette démocratie Athénienne ? Seconde question découlant directement de la première : est-ce un manque de démocratie dont nous souffrons aujourd'hui ou est-ce tout simplement la démocratie en elle-même qui constitue le problème ?
Définitions préalables
- La République : désigne avant tout l’objet même du pouvoir politique : le bien commun, la chose publique (" res publica "). Par extension c’est l’Etat de droit représenté un gouvernement légitime dont le pouvoir ne s’exerce que sur des hommes libres. L’aristocratie ou la démocratie ont pour objet cette res publica
- La démocratie (demos = peuple et kratos = pouvoir). Il s’agit du gouvernement du peuple "par le peuple". L’égalité constitue donc le moteur de ce régime. En pratique à Athènes, soit le lieu d’origine de ce régime, se réunissaient l’ensemble des citoyens afin de voter les lois.
- L’ochlocratie (okhlos = foule) : L’ochlocratie est une forme de gouvernement dans lequel la foule a le pouvoir d’imposer sa volonté. L’ochlocratie est considérée comme une dérive possible de la démocratie
- L’aristocratie (aristoi = les meilleurs et kratos = pouvoir) consiste en un gouvernement constitué "des meilleurs" parmi les individus d’une communauté. C’est à dire, d’une part les plus ’capables’ et d’autre part les plus ’vertueux’ d’entre eux.
- L’oligarchie (oligarkhía = pouvoir par le petit nombre) désigne le fait qu’un "petit nombre" de personne exercent le pouvoir. Il peut s’agir alors d’une aristocratie (= gouvernement des meilleurs), d’une ploutocratie (= gouvernement des plus riches), d’une technocratie (= gouvernement des scientifiques et autres techniciens)
- La timocratie (Timokratia = pouvoir par l’honneur) consiste en un gouvernement dont le fondement constitue la recherche de l’honneur (notion définie par Platon)
La démocratie vue par Platon
Avant d’aborder directement les écrits de Platon, voici 2 vidéos rappelant certaines "vérités" sur la démocratie athénienne dans laquelle l’idéale "égalitaire" fut en réalité un leurre, d’autant qu’Athènes n’a eu de cesse d’entretenir des velléités conquérantes. Un peu comme la gauche colonialiste sous Jules Ferry...
Voici les 5 types de constitutions envisagées par Platon, citées dans l’ordre décroissant de la meilleure à la pire :
- L’aristocratie ou La constitution parfaite, en laquelle tout est commun (femmes, enfants, éducation, moyens de défense) et où les gouvernants sont philosophes (thèse célèbre des " philosophes-rois " = pouvoir et sagesse sont réunis en une seule main).
- La timocratie (fondée sur l’honneur)
- L’oligarchie (fondée sur l’appétit des richesses)
- La démocratie (fondée sur l’égalité des riches et des pauvres)
- La tyrannie (fondée sur le désir -négation même de la politique car absence de lois)
Ainsi, pour Platon, la démocratie constitue le "pire des régimes républicains" (la tyrannie n’étant pas considérée comme républicaine). Platon théorise même l’aspect évolutif des régimes, la démocratie finissant par conduire...à la tyrannie. Schématiquement, cette évolution ressemble à ceci :
Démocratie —> Ochlocratie —> anarchie —> Tyrannie
Extraits de La République (562 b- 564 a)
"Mais n’est-ce pas le désir insatiable de ce que la démocratie regarde comme son bien qui perd cette dernière ? I.e., la liberté ? En effet, dans une cité démocratique, tu entendras dire que c’est le plus beau de tous les biens, ce pourquoi un homme né libre ne saurait habiter ailleurs que dans cette cité. (…) Lorsqu’une cité démocratique, altérée de liberté, trouve dans ses chefs de mauvais échansons, elle s’enivre de ce vin pur au-delà de toute décence ; alors, si ceux qui la gouvernent ne se montrent pas tout à fait dociles et ne lui font pas large mesure de liberté, elle les châtie, les accusant d’être des criminels et des oligarques. Et ceux qui obéissent aux magistrats, elle les bafoue et les traite d’hommes serviles et sans caractère. Par contre, elle loue et honore, dans le privé comme en public, les gouvernants qui ont l’air d’être gouvernés et les gouvernés qui prennent l’air d’être gouvernants. N’est-il pas inévitable que dans une pareille cité l’esprit de liberté s’étende à tout ? Qu’il pénètre dans l’intérieur des familles, et qu’à la fin, l’anarchie gagne jusqu’aux animaux ? Que le père s’accoutume à traiter son fils comme son égal et à redouter ses enfants, que le fils s’égale à son père et n’a ni respect ni crainte pour ses parents, parce qu’il veut être libre, que le métèque devient l’égal du citoyen, le citoyen du métèque, et l’étranger pareillement. (…)Or, vois-tu le résultat de tous ces abus accumulés ? Conçois-tu bien qu’ils rendent l’âme des citoyens tellement ombrageuse qu’à la moindre apparence de contrainte ceux-ci s’indignent et se révoltent ? Et ils en viennent à la fin, tu le sais, à ne plus s’inquiéter des lois écrites, afin de n’avoir absolument aucun maître. Eh bien ! c’est ce gouvernement si beau et si juvénile qui donne naissance à la tyrannie. (…) Ainsi, l’excès de liberté doit aboutir à un excès de servitude, et dans l’individu, et dans l’Etat. "
En évoquant l’aboutissement du régime à la "tyrannie", Platon ne faisait, en réalité que s’appuyer sur des faits historiques puisque, suite à la défaite d’Athènes face à Sparte lors de la guerre du Péloponnèse, s’est établi ce qu’il est convenu d’appeler le "régime des trente". Soit 30 oligarques qui ont pris le pouvoir et abolit la plupart des institutions démocratiques.
Par ailleurs, les analogies de ce siècle démocratique athénien avec notre chère "démocratie représentative" actuelle ne manquent pas : démagogie, formation de "groupes de pression" dans les affaires de la Cité, relativisme de plus en plus présent,...bref tout un ensemble de comportements que Socrate avaient dénoncés, dénonciations qui aboutirent...à sa condamnation à mort
Mais il y a une cause racine à tout cette dérive, cause qui fut envisagée par Platon puis ensuite, des siècles plus tard théorisée par un libéral appelé Tocqueville : l’individualisme !
L’évolution démocratique théorisée par Alexis de Tocqueville
Voici un extrait du fameux ouvrage de Tocqueville : De La démocratie en Amérique dans lequel il dénonce l’importance accordé au "nombre" inhérent à la démocratie et à son évolution (fatale) en ochlocratie puis à la tyrannie à laquelle conduit la "masse".
"Je veux imaginer sous quels traits nouveaux le despotisme pourrait se produire dans le monde : je vois une foule innombrable d’hommes semblables et égaux qui tournent sans repos sur eux-mêmes pour se procurer de petits et vulgaires plaisirs, dont ils emplissent leur âme. Chacun d’eux, retiré à l’écart, est comme étranger à la destinée de tous les autres : ses enfants et ses amis particuliers forment pour lui toute l’espèce humaine ; quant au demeurant de ses concitoyens, il est à côté d’eux, mais il ne les voit pas ; il les touche et ne les sent point ; il n’existe qu’en lui-même et pour lui seul, et, s’il lui reste encore une famille, on peut dire du moins qu’il n’a plus de patrie.
Au-dessus de ceux-là s’élève un pouvoir immense et tutélaire, qui se charge seul d’assurer leur jouissance et de veiller sur leur sort. Il est absolu, prévoyant, régulier et doux. Il ressemblerait à la puissance paternelle si, comme elle, il avait pour objet de préparer les hommes à l’âge viril ; mais il ne cherche, au contraire, qu’à les fixer irrévocablement dans l’enfance ; il aime que les citoyens se réjouissent pourvu qu’ils ne songent qu’à se réjouir. Il travaille volontiers à leur bonheur ; mais il veut en être l’unique agent et le seul arbitre ; il pourvoit à leur sécurité, prévoit et assure leurs besoins, facilite leurs plaisirs, conduit leurs principales affaires, dirige leur industrie, règle leurs successions, divise leurs héritages ; que ne peut-il leur ôter entièrement le trouble de penser et la peine de vivre"
L’évolution démocratique, avec sa recherche de toujours plus d’égalité accompagnée d’une atomisation de plus en plus profonde des individus finit par aboutir à un monde effrayant, tel qu’ont pu le décrire Georges Orwell ou encore Aldous Huxley. Voilà les dangers potentiels de la démocratie.Or, historiquement qu’avons-nous constaté depuis plus d’un siècle en pays démocratiques :
- 2 guerres mondiales les plus meurtrières de toute l’Histoire de l’Humanité
- L’avènement des 2 plus grands totalitarismes de toute l’Histoire, ayant tous deux prospéré sur l’influence de la "masse" des individus.
- Une atomisation des sociétés occidentales, avec un égoïsme grandissant partout, la Toute-puissance du marché faisant fi des frontières car faisant la loi. Avec, en parallèle, un accroissement égalitaire sur le plan politique et sociétal, et une inégalité ’de fait’ de plus en plus accrue sur le plan matériel et social.
- Une inversion des valeurs traditionnelles qui se traduit par un rejet de toute forme d’essentialisme (car jugée ’facho’) avec pour corollaire un rejet de la Nature (théorie du genre, etc...) tout ça au nom de l’égalité
Et Tout cela, répétons-le avec force, en parfaite analogie avec l’évolution de la Démocratie Athénienne au 5ès av JC
Enfin évoquons Jean-Jacques Rousseau, le père du "Contrat Social" et l’un des principaux théoriciens de la "souveraineté populaire", donc peu soupçonnable d’être taxé de ’vilain réactionnaire’ et qui, pourtant, estimait que c’était l’Aristocratie qui était le meilleur des régimes. J’invite donc tous les gens se revendiquant "de gauche" à relire attentivement le Contrat Social (Livre 3, ch V)
"
Les premières sociétés se gouvernèrent aristocratiquement. Les chefs de famille délibéraient entre eux des affaires publiques ; les jeunes gens cédaient sans peine à l’autorité de l’expérience. De là, les noms de Prêtres, d’anciens, de Sénat, de Gérontes. les sauvages de l’Amérique septentrionale se gouvernent encore ainsi de nos jours et sont très bien gouvernés...
444 réactions
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Soi même 22 juin 2014 04:43
@ micnet, il serait temps de changer de référence, cela fait 2500 ans que le Grand Platon a pensé sur le sujet entre temps l’individualisme a émerger , il faudrait peut être réactualisé vos références en accort à notre époque !
http://www.democratieevolutive.fr/fr/
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micnet 22 juin 2014 11:13
@MaQ
Bonjour à vous,Ayant bien lu les derniers échanges, voici mes réponses :"Je veux bien l’imaginer mais alors il faut donner un nom adéquat à cette idéologie sinon, on ne s’en sort pas …"---> A cela, je vous ai répondu plusieurs fois : l’idéologie qui sous-tend la démocratie est celle qui consacre "l’individu-roi" (individualisme).Au préalable, je rebondis sur la remarque que vous aviez faite à Eric concernant le fait que nous sommes tous des militants. Remarque que je partage (encore faut-il bien s’entendre sur le terme) et j’ajoute ceci, pour répondre à votre interrogation sur l’idéologie : nous sommes tous des idéologues !Autrement dit, toute forme de régime découle d’une idéologie !Donc, la démocratie est un régime qui découle de l’idéologie consacrant l’individu-roi et se caractérise par 2 marqueurs que constituent la liberté individuelle ainsi que l’égalité.Lorsque vous me dites que les libéraux, au-départ, n’étaient pas démocrates, vous oubliez de préciser que ces derniers n’étaient pas pour l’égalité. J’ai bien précisé qu’il faut les 2 éléments (liberté individuelle, égalité)Ensuite vous écrivez en réponse à Eric :"je ne m’appuie pas sur Aristote pour définir un régime aristocratique, ces régimes existaient de toute façon bien avant sa naissance, et il n’a pas connu tous les régimes aristocratiques qui ont existé …"---> Dans ce cas, si vous ne vous appuyez pas sur Aristote qui a, en quelque sorte inventé ces "concepts" (il n’a bien sûr pas inventé les "pratiques" mais c’est lui qui les a théorisées et qui a ainsi posé les bases de la "Politique" au sens large) pouvez-vous nous préciser sur QUI vous vous fondez ? Il faut toujours préciser d’où on part. Le fait de dire "l’Aristocratie c’est le gouvernement des meilleurs" découle aussi de la mouvance Platon-Aristote. Donc si vous rejetez Aristote, il faut le rejeter complètement en rejetant aussi sa définition de base.Quant à moi, lorsque j’évoque les 2 marqueurs idéologiques inhérents à la démocratie" que sont la liberté (en réalité illusoire pour Aristote) et l’égalité, je ne parle pas en l’air et ne fais que m’appuyer, précisément, sur Aristote :" Le principe du gouvernement démocratique, c’est la liberté. On croirait presque, à entendre répéter cet axiome, qu’on ne peut même pas trouver de liberté ailleurs ; car la liberté, dit-on, est le but constant de toute démocratie. Le premier caractère de la liberté, c’est l’alternative du commandement et de l’obéissance. Dans la démocratie, le droit politique est l’égalité, non pas d’après le mérite, mais suivant le nombre. Cette base du droit une fois posée, il s’ensuit que la foule doit être nécessairement souveraine, et que les décisions de la majorité doivent être la loi dernière, la justice absolue ; car on part de ce principe, que tous les citoyens doivent être égaux. Aussi, dans la démocratie, les pauvres sont-ils souverains à l’exclusion des riches, parce qu’ils sont les plus nombreux, et que l’avis de la majorité fait loi. Voilà donc un des caractères distinctifs de la liberté ; et les partisans de la démocratie ne manquent pas d’en faire une condition indispensable de l’État.§ 7. Son second caractère, c’est la faculté laissée à chacun de vivre comme il lui plaît ; c’est là, dit-on, le propre de la liberté, comme c’est le propre de l’esclavage de n’avoir pas de libre arbitre. Tel est le second caractère de la liberté démocratique. Il en résulte que, dans la démocratie, le citoyen n’est tenu d’obéir à qui que ce soit ; ou s’il obéit, c’est à la condition de commander à son tour ; et voilà comment, dans ce système, on ajoute encore à la liberté, qui vient de l’égalité."
Aristote, Politique (livre VII, ch 1 par 6-7)
CQFD !
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maQiavel 22 juin 2014 11:53
@micnet
-Dans ce cas, si vous ne vous appuyez pas sur Aristote qui a, en quelque sorte inventé ces "concepts"
---> Aristote a inventé les concepts de régime politiques ??? Vous pouvez montrer qu’ils n’existaient pas avant Aristote ?
Non, cela est faux, même les présocratique parlaient des régimes politiques et des politiciens avant même la naissance de Platon et Aristote utilisaient ces mots.
-pouvez-vous nous préciser sur QUI vous vous fondez ?
--->Je me fonde sur les catégories de la science politique.
-Le fait de dire "l’Aristocratie c’est le gouvernement des meilleurs" découle aussi de la mouvance Platon-Aristote.
---> Ca découle de l’étymologie du terme , aristoi : les meilleurs, et kratos : pouvoir, autorité, gouvernement.
Ce ne sont tout de même pas aristote et Platon qui ont inventé ce mot puisque bien des philosophes ( et pas seulement , des politiques aussi ) avant eux les ont utilisé …
-et ne fais que m’appuyer, précisément, sur Aristote :
Moi je ne m’appuie pas sur Aristote !
Et je ne suis pas d’ accord avec ce lien entre démocratie et individualisme, de façon empirique, c’est à dire au regard de ce qui a existé dans l’histoire.
Pour le reste vous avez le droit de vous appuyez sur Aristote et Platon, pour vous contrer je peux m’appuyer sur Démocrite ou Machiavel …
Si vous rajouter des penseurs pour corroborer Aristote et Platon, je peux aussi rajouter des penseurs qui les contredisent …
Nicolas Machiavel : la foule est plus sage et plus constante qu’un prince.
Donc si vous vouliez vous servir de Platon et Aristote comme des gens détenteurs d’une vérité absolue qui devrait s’imposer à tous, c’ est raté …
-Autrement dit, toute forme de régime découle d’une idéologie !
Ce n’est pas faux, il y’ a sans doute un substrat idéologique commun entre toutes les aristocraties, démocraties , monarchies !
Mais dès que l’ on s’ éloigne de ce substrat idéologique commun , le systèmes de valeurs au sein d’ un même régime peut être très différent raison pour laquelle il y’ a des monarchies , des aristocraties , des démocraties très différentes les unes des autres.
Et donc, puisque nous sommes d’ accord au moins là-dessus , voici ma contre -attaque ;
---> Puisque le régime représentatif est de structure aristocratique , il découle d’ un substrat idéologique commun qui est que les meilleurs sont ceux qui doivent exercer le pouvoir.
Par conséquent, s’il faut condamner le régime représentatif, il faut en condamner l’esprit aristocratique …
l’idéologie qui sous-tend la démocratie est celle qui consacre "l’individu-roi" (individualisme).
---> Je vous réponds que c’est faux !
Il est facile de contrer cette assertion en deux points :
1. Les régimes représentatifs sont théoriquement aristocratiques et consacrent l’individu roi
2. Il a existé des tas de démocraties dans laquelle l’individu n’est pas roi.
-Donc, la démocratie est un régime qui découle de l’idéologie consacrant l’individu-roi et se caractérise par 2 marqueurs que constituent la liberté individuelle ainsi que l’égalité.
---> Ca c’est l’idéologie libérale …
Lorsque vous me dites que les libéraux, au-départ, n’étaient pas démocrates, vous oubliez de préciser que ces derniers n’étaient pas pour l’égalité.
---> Bien sur qu’il était pour l’égalité, ils étaient pour l’ isonomie…
Ca c’est un fait, l’égalité des droits fait partie des fondamentaux de la philosophie libérale …
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maQiavel 22 juin 2014 12:45
-Par conséquent, s’il faut condamner le régime représentatif, il faut en condamner l’esprit aristocratique …
Et Qaspard plus haut met en évidence cette idéologie aristocratique : « les défenseurs du système en place prétendent que c’est juste le meilleur moyen de faire émerger les meilleurs (ou les moins mauvais) d’entre nous, et que la démocratie bien entendue n’est que le droit reconnu à tous les "citoyens" de participer à cette élection du meilleur (et rien de plus, donc certainement pas d’exercer l’autorité politique). . Dans leur conception, la démocratie est le moyen d’une aristocratie (et même "le moins mauvais des moyens d’élire les meilleurs") »
-pouvez-vous nous préciser sur QUI vous vous fondez ?
--->Je me fonde sur les catégories de la science politique.
Cela ne vous satisfera pas, dans ce cas je vais préciser, j’entends par science politique l’étude des processus politique mettant en jeu les rapports de force politique.
Elle remonte à l’antiquité , avec Aristote et Platon , certes mais pas seulement , d’ autres ont abordés ces questions avant eux , comme Démocrite , Héraclite , Thucydide ) et elle ne nait pas seulement en Grèce puisque les Grecs eux-mêmes sont allées s’ instruire chez les Egyptiens voir chez les hindous , il faut aussi s’ intéresser à la Chine.
A la renaissance, il y’ a eu un essor avec évidemment Nicolas Machiavel et ses héritiers, et puis la mouvance des lumières.
Aujourd’hui, elle est un champ important de recherche d’ ou le terme « science » ( que je n’ aime pas ) qui s’ appuient en gros sur les sciences sociales ( enquêtes de terrain , recherches d’archives etc. ) et donc retracent l’ histoire longue de la politique afin de mettre en lumière les logiques sociales à l’œuvre dans la vie politique.
En ce qui concerne les régimes politiques, la classification n’est pas identique pour tous le monde , on distingue parfois système politique de régime politique , parfois tout est mélangé etc.
Pour ce qui est de la définition de l’aristocratie, et sa différence fondamentale avec la démocratie outre l’étymologie des termes qui permettent de faire la distinction (aristoi : les meilleurs dêmos : peuple et kratos ; pouvoir, gouvernement), on peut faire référence à Montesquieux ou Rousseau entre autres :
L’Esprit des Lois : « Le suffrage par le sort est de la nature de la démocratie. Le suffrage par le choix est de celle de l’aristocratie. »
Du contrat social : « Le suffrage par le sort est de la nature de la Démocratie (…).Dans l’Aristocratie le Prince choisit le Prince, le Gouvernement se conserve par lui-même, & c’est là que les suffrages sont bien placés ».
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Éric Guéguen 22 juin 2014 12:59
"Le gouvernement des meilleurs absolument selon la vertu et non pas des gens de bien dans une perspective particulière peut seul à bon droit être nommé aristocratie. C’est, en effet, là seulement que l’homme de bien et le bon citoyen sont une seule et même personne absolument, alors que dans les autres constitutions les citoyens ne sont bons qe relativement à la constitution qui est la leur. Cependant il existe certaines formes qui diffèrent de celles qui ont un oligarchique aussi bien que de ce qu’on appelle le gouvernement constitutionnel, et que pourtant on appelle des aristocraties. Là, en effet, on ne choisit pas les magistrats seulement parmi les riches, mais aussi parmi les meilleurs. Une telle constitution diffère des deux autres et est dite aristocratique. Car même dans les régimes où le souci de la vertu n’est pas commun, il existe cependant certaines gens qui sont estimés et qu’on pense être d’honnêtes gens. Là donc où la constitution prend en compte et la richesse et la vertu et le peuple, comme à Carthage, elle est aristocratique, et de même celles qui ne prennent en compte que deux de ces éléments, comme les Lacédémoniens le font pour la vertu et le peuple : on a là une combinaison de ces deux éléments, la démocratie et la vertu."
Les Politiques, Livre IV, chapitre 7, traduction Pierre Pellegrin.-
Éric Guéguen 22 juin 2014 14:51
Et qu’est-ce que la liberté ? Qu’est-ce que l’égalité ? Qu’est-ce que le pouvoir ? Qu’est-ce que la politique ? Qu’est-ce que l’homme ? Etc.
Selon Aristote, la vertu est la disposition à bien faire ce qu’on est apprêté à faire. -
Éric Guéguen 22 juin 2014 15:14
Machiavel, vous ne pouvez pas faire de la philosophie politique sur des sables mouvants. À un moment, il vous faut accepter une parcelle de terrain meuble. Ou bien faire autre chose...
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maQiavel 22 juin 2014 15:35
La politique se rattache aux sociétés humaines, et ces sociétés sont extrêmement mouvantes, et la cause de cela est le caractère adaptatif de l’homme.
L’homme est l’animal dont le potentiel adaptatif est le plus grand et cela a pour conséquences l’existence d’une très grande variété de sociétés humaines et de systèmes de valeurs qui les régissent.
Je pense que s’il faut penser les sociétés, il faut aussi penser cette diversité au risque de n’aborder les choses que de son point de vue topique …
Pour ce qui est de la disposition à bien faire, je crois qu’elle est variable puisque la notion de Bien l’est également, ceux qui ont créé le régime représentatif ont aussi voulu bien faire et ont considéré que celui qui est élu est celui qui incarne ce Bien, cette vertu dans leur système de valeur.
Certes , leur conception du Bien et de la vertu n’ a rien de commun avec Aristote ( et ils sont loin d’ être seuls dans ce cas ) , mais ne voyez vous pas qu’ ils ont essayé de mettre en place le gouvernement des meilleurs ( meilleurs dans leur système de représentation du monde évidemment ) ? Dans ce cas, ne s’agit il pas précisément d’une aristocratie ? Je ne parle même pas du fait qu’ils aient eu raison ou tort , mais uniquement de leur intention …
-À un moment, il vous faut accepter une parcelle de terrain meuble.
Et cela pour moi, ce sont les définitions dont les critères sont objectifs.
Aristocratie : gouvernement des meilleurs.
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Éric Guéguen 22 juin 2014 19:17
La conviction qu’il y a un bien et un mal, ne la croyez-vous pas, quant à elle, universelle ? N’est-ce pas là le principal et le plus déroutant ?
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maQiavel 22 juin 2014 20:01
Oui , il me semble en effet que les êtres humains ont la conviction qu’ il existe un Mal et un Bien , même s’ ils ne le définissent pas de la même façon …
Pourquoi ? Je n’ai pas de réponse acceptable à vous fournir, mais si cela existe chez tous les humains ont peut émettre l’hypothèse que c’est une caractéristique universelle et naturelle
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maQiavel 22 juin 2014 13:01
D’ après ce que je lis, la notion d’aristocratie puise ses origines chez les indos Européens.
Le terme Arya, se dit en sanscrit Arya, en perse Ariya, en avestique airya et en grec Aristos. . Il désignait selon ces sources , les indo-européens. Avec les années, il devint synonyme de bravoure et d’héroïsme et ensuite de gouvernants !
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scalino 22 juin 2014 13:57
Dur de rebondir après un échange aussi riche ^^
Bon je me lance quand même sur un petit détail :Guéguen dit que pour avoir une aristocratie qui marche il faut que elle soit élu par des gens qui si connaissent en la matière (genre si une des valeurs que l’aristocratie doit avoir c est l économie alors il faut que se soit des économistes qui élisent les dirigeants ).Pour moi se système existe déjà cela s’appelle le corporatisme et le défaut principale de ce système (toujours pour moi ) c’est son manque d’innovation a long terme , car a long terme il y a un fort risque de formatage et donc mis a l’écart de ceux qui pensent en dehors "des clous" (en leur disant que ils ne sont pas vraiment économistes car non reconnu en reprenant mon exemple)Donc on se retrouverait en bout de course de système avec quelque chose de irréformable a cause d’un dogmatisme ambiant-
Éric Guéguen 22 juin 2014 19:37
Bonjour, et merci pour ce message.
En fait, je n’ai pas exactement dit cela, mais passons car en définitive je suis d’accord avec vos propos. À un détail près : l’exemple de l’économie est un très mauvais exemple relativement aux valeurs antiques car c’était à n’en pas douter l’activité perçue à l’époque comme la moins nobles de toutes et la plus éloignée de l’idéal gentilhomme (qui avait, je vous l’accorde, les cartes en main pour dauber sur les marchands, lui qui n’avait pas besoin de bosser pour gagner sa croûte).
Bref, l’aristocratie ne focalise pas sur un domaine en particulier, elle escompte simplement pousser sur le devant de la scène les gens les plus qualifiés dans chaque domaine de la vie des hommes.
Vous m’invitez ainsi à répondre à tout le monde, et à Machiavel en particulier, en ajoutant ceci : le fait même de s’enquérir de trouver les meilleurs implique que l’on émet un jugement de valeur, que l’on distingue, que l’on place certains au-dessus de certains autres, et que l’on a, conséquemment, une vision verticale de la société. Le problème, comme vous l’avez relevé, c’est que cette verticalité risque à tout moment de se figer, de se scléroser. Ce n’est donc pas la verticalité le problème, mais sa tendance à se figer. En politique, le principe de la rotation des charges athénien me semble tout à fait intéressant pour pallier le phénomène. -
scalino 22 juin 2014 21:02
L’économie n’est qu’un exemple pour illustrer et il me semble convenir pour illustrer le risque de sclérose : il suffit d’imaginer les économistes de notre époque qui choisiraient le dirigeant de notre nation vu leur aveuglement nous irions tous droit vers le néo libéralisme le plus débridé vu qu’ils n’arrivent a imaginer aucune alternative a cause de leurs dogmatismes et rejette avec férocité la minorité d’économiste qui ne pensent pas comme eux
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scalino 22 juin 2014 21:20
Pour la rotation des charges je suis un peu circonspect dans les faits c’est séduisant mais est ce que dans la réalité ça permet de limiter efficacement la sclérose j’ai un doute car si c’est une rotation de gens issus du même sérail ça ne change rien il pense la même chose (voir nos politiques actuelles qui pratiquent le système d’alternance mais qui ne change rien dans les faits ) peut être couplé avec le tirage au sort (si j’ai bonne mémoire c’était le cas dans la démocratie athénienne )mais on court toujours le risque d’avoir des personnes médiocre avec ça et les personnes remarquables seraient aussi éjecté au bout de un an alors que ils mériteraient de restés plus longtemps
Je pense que le fonds du problème c est d arriver a éjecter du pouvoir les personnes médiocres (mais sous quelles critères ? et comment savoir si ce n’est pas sous l’effet de la sclérose que on les juges médiocres ?)et garder les personnes remarquables (mais resteront t’elles remarquables ? combien de temps ? le pouvoir est corrupteur mais qu’elle degré de résistance ont ils ?)Ces questions m’interpellent car avoir un bon gouvernement doit préjugé que le système mis en place arrive a juger les valeurs des hommes de manière objective et cela dans un temps continu (pas juste a l’instant t comme un examen ) -
Éric Guéguen 22 juin 2014 22:41
Il faut se sortir de la tête que les gens "du même sérail" sont tous du même niveau. Il y a les bons, les sous-évalués, les usurpateurs, les handicapés de la vie en société, etc. Le fils d’un notable est peut-être une sous-merde, le fils d’un ouvrier est peut-être un génie. Ce sont les natures singulières qu’il faut sonder, il ne faut pas courir après un panel représentatif à tout prix. Ça c’est bon pour notre régime de merde actuel, avec tant de noirs, tant de femmes, tant de végétariens, tant de couturières bosniaques, etc. C’est utile pour remplir les camemberts des sociologues d’État. La vraie vie, c’est autre chose...
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maQiavel 22 juin 2014 15:17
Soi meme , une question : pourquoi êtes vous aussi agressif ?
Je ne vous juge pas , vous avez le droit de vous conduire comme vous le désirez , je ne défend pas non plus micnet , il n’ a pas besoin de moi pour ça , mais ne trouvez vous pasque les choses seraient plus enrichissante que le cadre d’ un échange soit fondé sur la cordialité et l’ amabilité ( ce qui n’ empêche pas une certaine combativité et pugnacité dans la défense de ses opinions ).Je le répète , je ne vous juge pas ( qui suis je pour le faire de toute façon ? ) , mais c’ est juste une question que je pose ...
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micnet 22 juin 2014 15:31
@MaQ, Eric, Qaspard
Je pense que nous pouvons nous accorder sur quelques points :1) Le régime représentatif nous mène tout droit dans le mur2) La démocratie (la vraie) tout comme l’aristocratie (la vraie) constituent 2 visions idéalistes (ce qui ne signifie pas nécessairement "irréalisable").Concernant la Démocratie, il est à noter que même JJ Rousseau n’y croyait pas vraiment, considérant même que celle-ci n’a, pour ainsi dire, jamais existé (contrairement à l’aristocratie qui pré-existait au sein des "premières sociétés) :"A prendre le terme dans la rigueur de l’acception, il n’a jamais existé de véritable Démocratie, et il n’en existera jamais. Il est contre l’ordre naturel que le grand nombre gouverne et que le petit soit gouverné. On ne peut imaginer que le peuple reste incessamment assemblé pour vaquer aux affaires publiques, et l’on voit aisément qu’il ne saurait établir pour cela des commissions sans que la forme de l’administration change...Ajoutons qu’il n’y a pas de Gouvernement si sujet aux guerres civiles et aux agitations intestines que le Démocratique ou populaire, parce qu’il n’y en a aucun qui tende si fortement et si continuellement à changer de forme, ni qui demande plus de vigilance et de courage pour être maintenu dans la sienne...S’il y avait un peuple de Dieux, il se gouvernerait Démocratiquement. Un Gouvernement si parfait ne convient pas à des hommes"JJ Rousseau Du Contrat Social (L III, ch 4)@MaQ"Pour le reste vous avez le droit de vous appuyez sur Aristote et Platon, pour vous contrer je peux m’appuyer sur Démocrite ou Machiavel …"—> Très bien ! Je reconnais que vous êtes cohérent dans ce choix puisque Démocrite, de ce que j’en sais, fut un "matérialiste athée et humaniste". Et qui dit "humaniste" finit par dire..."individualiste (et oui, si on place l’Homme en tant que finitude, on place aussi l’individu).En tout cas, on peut convenir ensemble qu’il y a bien une approche "horizontale" (celle de Démocrite, des philosophes humanistes, de Marx...) et une approche "verticale" (Platon, Aristote, Tocqueville,...). Les uns étant, globalement, des défenseurs de la Démocratie et les autres de l’Aristocratie. ce que moi j’appelle le véritable "gauche-droite". Je pense, pour ma part (et peut-être serons-nous d’accord sur ce point) que ce qui transcende ce clivage correspond à ceux que l’on appelle les "anarchistes-chrétiens...ou les "anars de droite". Mais là, c’est moi qui digresse...Quant à Machiavel, il arrive après mais c’est aussi un choix cohérent, bien sûr"Je vous réponds que c’est faux !Il est facile de contrer cette assertion en deux points :
1. Les régimes représentatifs sont théoriquement aristocratiques et consacrent l’individu roi
---> On tourne en rond puisque vous refusez d’admettre que le régime représentatif repose sur une idéologie commune avec celle inhérente à la Démocratie, c’est à dire, en effet, l’individu-roi
2. Il a existé des tas de démocraties dans laquelle l’individu n’est pas roi.
---> Oui, je sais, vous allez me ressortir votre exemple récurrent de certaines peuplades qui "seraient démocratiques". Sauf que, désolé si je vous parais un peu abrupt dans ma réponse mais tout ceci repose sur un fantasme bien moderne et idéologique qui idéalise les peuples primitifs.
Je suis en train de lire l’ouvrage de Malthus (anthropologue du XVIIIè s) qui a beaucoup voyagé et observé de près ces populations (il en parle dans son Principe des populations) et il n’a pas, mais alors pas du tout la même description que celle que vous en faites. Là, on pourrait en débattre des heures et j’ai peur que, là aussi on ne tourne en rond puisque les anthropologues ne sont pas d’accord entre eux. Qui plus est d’une époque à l’autre...
"Lorsque vous me dites que les libéraux, au-départ, n’étaient pas démocrates, vous oubliez de préciser que ces derniers n’étaient pas pour l’égalité.
---> Bien sur qu’il était pour l’égalité, ils étaient pour l’ isonomie…
---> De quels libéraux parlez-vous ? Pas les "libéraux-conservateurs" en tout cas qui, effectivement, postulaient le principe de " l’égalité des chances" mais n’accordaient pas une priorité, c’est le moins que l’on puisse dire, à l’égalité politique (Les Montesquieu, Tocqueville, Montalembert, etc...)
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maQiavel 22 juin 2014 15:45
@micnet
Point 1 : Je pense que le régime représentatif s’il est rénové ( et d’ ailleurs je me souviens de votre plaidoyer pour une nouvelle constitution ) peut être à mon sens bien meilleur.
Point 2 : Vous avez raison, il y’ a un idéalisme démocratique et aristocratique ( il faudrait d’ ailleurs rajouter un idéalisme monarchique qui est aussi très caractéristique ).
De vraies démocraties , aristocraties , monarchies , si elles devaient exister ne pourraient exister qu’ un temps avant de dégénérer en ochlocratie , oligarchie , Tyrannie , aucun régime politique n’ est parfait ( je pense même qu’ il n’ en existe pas de bon ) , et parce qu’ ils sont imparfait , ils sont condamné à dégénérer.
En ce sens je ne suis pas un idéaliste !
Pour le reste, on risque de tourner en rond encore longtemps , il est temps de trouver un petit quelque chose sur le quel on puisse s’entendre …
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Qaspard Delanuit 22 juin 2014 21:18
"Pour le reste, on risque de tourner en rond encore longtemps , il est temps de trouver un petit quelque chose sur le quel on puisse s’entendre …"
C’est l’objet de mon intervention plus bas sur "la distinction essentielle".
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micnet 22 juin 2014 16:11
@MaQ
"Point 1 : Je pense que le régime représentatif s’il est rénové ( et d’ ailleurs je me souviens de votre plaidoyer pour une nouvelle constitution ) peut être à mon sens bien meilleur."---> Oui mais cet article plaidait, en quelque sorte, pour un régime mixte entre démocratie et aristocratie. On sort alors du cadre actuel."Pour le reste, on risque de tourner en rond encore longtemps , il est temps de trouver un petit quelque chose sur le quel on puisse s’entendre …"---> Je suis d’accord ! Aussi je pense que, si on veut (à notre tout petit petit niveau) avoir une chance de faire un tout petit peu bouger les choses en France, il me paraît nécessaire de nous poser les questions suivantes :- Que pouvons-nous faire de concret pour que ce "bi-partisme" à la Française dit "UMPS" cesse un jour (mis à part une guerre civile ou réelle) ?- Pourquoi ne proposeriez-vous pas un article expliquant votre projet de Constitution idéale ? (là on revient sur l’aspect philosophique de la question) Vous pourriez ainsi répondre au mien et ça me permettrait également de perfectionner mon premier jet- Je reviens sur votre remarque à propos de l’impossibilité faite au peuple d’avoir des leviers d’action. Je pense que ce n’est pas tout à fait exact : il faudrait se repencher en détails sur notre Constitution mais il me semble bien que l’on peut, dans certains cas précis, obliger l’état à provoquer des référendums. A vérifier...---> Et cette liste n’est pas exhaustive. Bref, voilà des sujets qui peuvent nous faire tous avancer, je penseA vous lire-
maQiavel 22 juin 2014 16:56
@micnet
-Oui mais cet article plaidait, en quelque sorte, pour un régime mixte entre démocratie et aristocratie. On sort alors du cadre actuel.
---> C’était différent du système actuel, mais votre ébauche de constitution restait dans le cadre d’un régime représentatif, puisque vous avez repris la notion de représentativité pour le pouvoir législatif notamment !
Mais j’étais globalement en accord avec votre ébauche, cela montre bien qu’il y’ a moyen de donner plus d’envergure au régime représentatif …
-Pourquoi ne proposeriez-vous pas un article expliquant votre projet de Constitution idéale ? (là on revient sur l’aspect philosophique de la question) Vous pourriez ainsi répondre au mien et ça me permettrait également de perfectionner mon premier jet
---> A vrai dire on était pratiquement d’ accord sur tout. On est tous les deux pour un régime mixte (mais au fait pourquoi se chamaille –t- on ?
) , je n’ ai pas grand-chose à rajouter.
Pour moi, il y’ a deux grands danger : l’ochlocratie, et donc pour y pallier il faut une certaine verticalité à deux niveaux :
1. Les électeurs, voir la fameuse proposition de Boris Voir la vidéo les 5 premières minutes et de 16 : 30 à la fin !
2. Les gouvernants : et là dessus ce que vous proposiez était très bon pour moi.
Et le deuxième danger, celui de l’oligarchie et là, il faut faire intervenir des contre pouvoirs ce que j’appelle un tribunat (inspiré du tribunat de la plèbe) avec
1. Une chambre de citoyens tirés de citoyens tirés au sort qui jouerait le rôle du Sénat,
2. une chambre de référendum tirée au sort (qui serait donc capable de déclencher tous les référendums qui existent dans la constitution Vénézuélienne)
3. Une constitution qui ne pourrait être modifiée que par référendum
Et au sommet de la structure Etatique, un prince (président) avec le cursus que vous aviez exigé dans votre constitution, sauf que moi je mettrai un mandat de 10 ans non renouvelable, pour ne pas que la gouvernance soit soumis aux aléats du court terme électoral, de la passion des sondages d’opinion et des intérêts personnels , il faut que celui qui gouverne puisse mettre en place des stratégies de moyen et long terme ( ce que les chinois font très bien actuellement , on peut dire que c’ est une dictature mais de ce coté là , ça fonctionne ).
Bref, un régime mixte entre monarchie, aristocratie et démocratie mais avec pour principe cette valeur chrétienne ( tout système politique doit se fonder sur des valeurs , et nous sommes dans un pays chrétien ) : « Que le plus grand parmi vous soit comme le plus petit, et celui qui gouverne comme celui qui sert ».
Sinon, je vous recommande à participer aux ateliers constituants, c’est très très très intéressant, je n’en ai fait que deux pour le moment mais c’est assez instructif !
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micnet 22 juin 2014 17:39
@MaQmais au fait pourquoi se chamaille –t- on ? "
---> Probablement parce que nous adorons ça l’un et l’autre
Pour moi, il y’ a deux grands danger : l’ochlocratie, et donc pour y pallier il faut une certaine verticalité à deux niveaux :
1. Les électeurs, voir la fameuse proposition de Boris Voir la vidéo les 5 premières minutes et de 16 : 30 à la fin !
---> J’ai écouté les 5 premières minutes : je suis 100% en phase avec la proposition de distinction entre les civils et les citoyens avec possibilité laissée aux civils de devenir des citoyens moyennant certains critères !
Je suis d’ailleurs d’autant plus en phase que j’ai évoqué ce point dans mon article sur la Constitution au-travers d’une sélection afin de devenir citoyens ;
Selon moi, le premier critère étant le désir de servir le Bien Commun
2. Les gouvernants : et là dessus ce que vous proposiez était très bon pour moi.
Et le deuxième danger, celui de l’oligarchie et là, il faut faire intervenir des contre pouvoirs ce que j’appelle un tribunat (inspiré du tribunat de la plèbe) avec
1. Une chambre de citoyens tirés de citoyens tirés au sort qui jouerait le rôle du Sénat,
2. une chambre de référendum tirée au sort (qui serait donc capable de déclencher tous les référendums qui existent dans la constitution Vénézuélienne)
---> Après avoir échangé avec Eric Gueguen sur ce sujet, je me range à son avis qui me paraît très pertinent quant à l’organisation parlementaire idéale : pourquoi ne pas imaginer 2 chambres comme suit :
1. L’ Assemblée Nationale qui serait composée de citoyens tirés au sort, citoyens qui aurait été préalablement eux-même sélectionnés grâce à leur investissement au service du Bien Commun. Cette Assemblée Nationale aurait donc une fonction "vertueuse" quant au vote des lois.
2. En regard de cette Assemblée Nationale, le Sénat serait composé de citoyens choisis grâce à leur compétence, que celles-ci soient d’ordre scientifique, technique, philosophique,etc...
---> Nous aurions donc 2 chambres qui, toutes deux, auront à se prononcer sur des choix éthiques ET des choix de compétences. Ce mode de fonctionnement dialectique éthique/compétence des 2 chambres qui se répondent l’une et l’autre me paraît très intéressant et est à creuser.
Pour tout le reste, je suis en phase avec vous
Sinon, je vous recommande à participer aux ateliers constituants, c’est très très très intéressant, je n’en ai fait que deux pour le moment mais c’est assez instructif !
---> Merci beaucoup pour l’info, c’est à étudier en effet
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maQiavel 22 juin 2014 18:07
Sur la question des deux chambres, c’est à peu près ce que je propose au niveau législatif, donc je suis d’ accord mais 2 choses :
1. Il faut des contre –pouvoir, parce je n’ai pas confiance, donc si on peut fixer dans ce système organisationnel les contre pouvoirs que j’ai mentionné plus haut , tout va bien.
2. Il faut un prince, un président, bref un monarque élu , qui incarne les institutions. N’ oublions pas que nous sommes Français , que nous avons plus d’ un millénaire d’ histoire royale que les Français veulent un souverain , une sorte de père de la nation, en France , le pouvoir doit avoir un visage , je ne discute pas de savoir si c’ est bien ou mal , mais c’ est le caractère propre du peuple Français , et il faut faire avec. D’ ou ma proposition d’ un président élu pour un mandat de dix ans non renouvelable.
Concernant la question de distinction citoyen / civil , l’ égalitarisme dogmatique vient gâter les choses à la 16 ème minute , figurez vous que j’ ai eu le même problème à mon premier atelier constituant mais j’ ai réussit à convaincre (difficilement ) mes co- constituants …
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maQiavel 22 juin 2014 17:45
Au fait concernant la question de la nature /culture , l’ inné / l’ acquis , le déterminisme social /le libre arbitre , un article vraiment intéressant vient d’ être posté par Nina K
Un extrait qui m’ a bien fait rire et me rappelle les fils de commentaire plus haut : https://www.youtube.com/watch?v=ZlJ6cmB567s#t=195
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micnet 22 juin 2014 18:02
@MaQ
Oui, amusant cet extrait en effet ^^.C’est vrai qu’il y avait eu toute une polémique à l’époque où Sarkozy était en campagne pour la présidentielle de 2007 concernant ses propos sur le "gène de la criminalité". Il avait débattu de ces questions avec Onfray mais je n’avais pas suivi en détail ce débat.De toute façon, cette controverse de l’acquis et de l’inné risque de durer encore très très longtemps... -
Éric Guéguen 22 juin 2014 19:24
J’écouterai ça avec grand plaisir demain. Je me souviens du débat à deux balles entre Onfray et Sarkozy, c’est vrai que c’était stéréotypé au possible.
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Éric Guéguen 22 juin 2014 19:28
J’aurais un paquet de choses à dire pour répondre aux uns et aux autres, mais je n’ai vraiment plus beaucoup de temps à passer sur le net en ce moment.
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Qaspard Delanuit 22 juin 2014 21:15
Le fait de n’avoir pas beaucoup participé au débat me permet de porter un regard un peu distant sur les arguments et il me semble que l’essentiel n’est pas "nommé". Je ne veux pas dire qu’il n’est pas traité, je dis bien qu’il en est constamment question sans qu’il soit nommé ou en tous cas pas assez clairement. Il est question dans ce débat (et en fait dans la plupart des débats politiques sur Agoravox) de quelque chose qui n’est pas dit assez fort. Je vais donc essayer de le dire.
Bien qu’il existe quantité de noms pour désigner diverses sortes de régimes politiques, je prétends qu’il ne reste en définitive que deux options possibles, une fois que l’on supprime les différences accessoires et les débats de méthode.1. L’humanité se gouverne elle-même.2. L’humanité est gouvernée par un principe étranger et supérieur à elle-même.Cette distinction est très bien illustrée par l’opposition Platon/Démocrite dans le lien donné plus haut par MaQ.Donc, il faudrait d’abord se positionner par rapport à cette distinction essentielle AVANT de débattre des méthodes... sans quoi le débat de principe se confond avec le débat de méthode et l’on tourne en rond en jonglant avec des concepts de liberté, d’individualisme, de relativisme, etc. qui ne sont que des accessoires.Si vous pensez que ma distinction primordiale n’est pas pertinente, alors énoncez-moi une troisième possibilité en plus des deux que je nomme. J’affirme que c’est impossible. La prétendue troisième pourra toujours se ramener à l’une ou l’autre des deux. ( Et pourtant je suis un esprit très "ternaire"mais la binarité existe aussi et il faut la reconnaître là où elle est.)
Ensuite, si vous admettez que cette distinction est pertinente : où vous situez-vous ?Enfin, à partir de l’une ou de l’autre de ces options essentielles, les méthodes politiques ne sont-elle pas plus simples à envisager, puisqu’il s’agit alors de faire simplement preuve de rationalité, la question essentielle (spirituelle, théologique, philosophique) ayant été traitée en amont ?-
maQiavel 22 juin 2014 21:30
1. L’humanité se gouverne elle-même.2. L’humanité est gouvernée par un principe étranger et supérieur à elle-même.
Moi j’ai tout de même un problème avec ces propositions, , je crois qu’ il existe un principe étranger à l’ humanité supérieure à elle-même ( j’ en suis persuadé en réalité ) mais seulement ce principe a laissé les hommes se gouverner eux-mêmes.
Bref, je suis chrétien.
Mais j’imagine que cela me rattache à la première catégorie, non ?
P.S ; quand je lis Platon dans le lien plus haut, j’ai l’impression que c’est un fou dangereux, mais j’ imagine que je suis un homme de mon époque …
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micnet 22 juin 2014 21:34
Bonsoir Qaspard,
Votre dualisme me sied à merveille (pour ma part, je parlerais d’horizontalité ou de verticalité, ce qui revient au même).Et je ne surprendrai personne, je pense, si je dis que ma préférence va au point 2). Je dis bien "préférence" car je ne la considère pas pour autant comme parfaite, loin de là.Alors ne pensez-vous pas que nous pouvons, malgré tout, faire interagir ces 2 options suivant un mode dialectique afin d’arriver à point d’équilibre, une synthèse qui serait la quintessence des 2 ? -
Qaspard Delanuit 22 juin 2014 22:45
@MaQiavel : "Moi j’ai tout de même un problème avec ces propositions, , je crois qu’ il existe un principe étranger à l’ humanité supérieure à elle-même ( j’ en suis persuadé en réalité ) mais seulement ce principe a laissé les hommes se gouverner eux-mêmes."
Ah mais ce n’est pas un problème. La question porte sur la reconnaissance éventuelle d’une autorité politique extérieure à l’humanité et non sur le fait qu’il puisse exister un principe ou des êtres supérieurs à l’humanité. Ce dont je suis convaincu aussi d’ailleurs. Ne serait-ce que des êtres vivants dans d’autres dimensions de l’univers, ou pouvant nous rendre visite, mais dont je n’attends pas qu’ils apportent une solution à nos problèmes politiques. -
Éric Guéguen 22 juin 2014 22:45
Bonsoir Gaspard.
Votre belle question mérite une réponse de haut niveau que je ne suis pas en mesure de vous livrer ce soir. Je m’y mets demain matin, promis !
À demain donc, et dormez bien avant cela. -
Qaspard Delanuit 22 juin 2014 22:53
@Micnet : "Alors ne pensez-vous pas que nous pouvons, malgré tout, faire interagir ces 2 options suivant un mode dialectique afin d’arriver à point d’équilibre, une synthèse qui serait la quintessence des 2 ?"
Je ne vois guère comment cela serait possible mais je suis prêt à examiner toute proposition concrète.Toutefois, auparavant, je voudrais savoir comment vous entendez précisément l’option 2.- Quelle est ce principe supérieur à l’humanité ?- Quelle est son intention avec l’humanité ?- Comment se manifeste-t-il ?- Comment le reconnaissons-nous pour authentique ?- Comment le faisons-nous reconnaître aux autres comme authentique ? -
Qaspard Delanuit 22 juin 2014 22:54
Fort bien, Eric, je suis impatient de ce rendez-vous avec Batman.
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BAB’s 23 juin 2014 04:43
@ Messieurs auxquels je me suis adressé sur mon premier commentaire :
Je suis ébahi du taux de rapidité / quantité de réponses ! Je ne sais pas ce que vous faîtes de vos journées mais il est clair que je ne pourrai pas suivre un débat à ce rythme écrit, l’agora numérique ne semble pas taillée pour moi.
Aussi je vous remercie pour vos réponses, je les lirai bien entendu mais ne suis pas du tout sûr d’avoir le temps de rebondir dessus.En espérant se croiser au hasard dans le réel ...
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micnet 23 juin 2014 09:12
@Qaspard
Bonjour à vous ! Bien que fondamentales, vos questions ne sont pas évidentes mais je vais tout de même me lancer :
"Quelle est ce principe supérieur à l’humanité ?"
---> Ce principe, certains (dont je fais partie) l’appellent Dieu. D’autres parleront de l’ordre naturel ou cosmique. Toujours est-il qu’il s’agit de la conviction selon laquelle l’Homme n’est qu’un maillon d’une grande chaîne, il est imbriqué dans un "grand tout" qui le dépasse et sa "mission" (si on peut employer cette expression) sur terre est de respecter ce principe supérieur que, si vous le voulez bien, j’appellerais "la Nature". Et vous aurez compris qu’il s’agit bien plus que d’écologie. Ou de la VRAIE écologie
- Quelle est son intention avec l’humanité ?
---> Là, je m’exprime principalement à travers mon prisme chrétien (mais sans doute pas que...), je dirais que ce "grand principe" a confié une mission à l’Homme, considéré comme LE maillon essentiel, de participer à la "marche de la création et de l’évolution du Monde".- Comment se manifeste-t-il ?
---> Ah alors là...Pour beaucoup, c’est principalement une question de foi. Sinon, globalement, si je raisonne d’un point de vue collectif, j’ai l’intime conviction que ce grand principe utilise des personnes ayant un don particulier (ce qu’on appelle des Grands Hommes) afin d’orienter l’évolution de l’Histoire suivant un sens bien particulier. Pour tout vous dire, je pense que l’ Histoire est le produit de la volonté humaine (libre-arbitre) et d’un certain déterminisme (d’aucuns l’appellent le ’hasard’) évolutif. (En langage "biblique" il est question " d’Alliance" entre Dieu et les hommes)
- Comment le reconnaissons-nous pour authentique ?
---> Je peux, en tout cas, être certain d’une chose : on ne peut pas le reconnaître pas la raison pure, objective. Pour le reconnaître, il faut, d’après moi, accepter justement l’idée selon laquelle l’Homme n’est pas la "Fin de tout". C’est tout l’objet de notre débat depuis le début, en fait- Comment le faisons-nous reconnaître aux autres comme authentique ?
—> Vous me posez une vraie colle...Et j’ai envie de répondre à peu près la même chose que pour le point précédent. J’ajouterais peut-être que l’Histoire ainsi que l’étude des civilisations, l’anthropologie, évoquant ces civilisations reposant sur ce "grand principe" sont des arguments essentiels en faveur de celui-ci.
Il suffit par exemple de faire une vraie étude comparative entre notre monde occidental, matérialiste et individualiste et l’ Ancien Monde.
Sans doute que ça ferait prendre conscience à beaucoup la nécessite de prendre en compte "ce grand principe".
C’est en tout cas ce que j’essaie de faire ici, à mon humble petit niveau...
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Qaspard Delanuit 23 juin 2014 15:02
Ok Micnet.
Mais comment envisagez-vous d’imposer et de maintenir un tel principe comme fondement de l’organisation politique, par exemple en France ? Par la force ? -
micnet 23 juin 2014 17:22
@Qaspard
Bien évidemment il ne s’agit pas d’imposer quoi que ce soit par la force. Je vous rassure, même si par moments je peux éventuellement donner l’impression d’être un réactionnaire fou-furieux (^^), je place la liberté en général (et la liberté d’expression en particulier) au-dessus de tout.Pour le reste, comment peut-on faire en sorte que le "grand principe" fasse autorité ? En fait, comme vous avez placé le débat à l’échelle de toute l’Humanité, je vous ai donné ma conception de ce grand principe qui, selon moi, se situe au-dessus de cette Humanité. Et là sincèrement, je ne vois pas comment mettre ça en place sur toute la Planète.Par contre, si on raisonne sur une échelle plus locale, à savoir par exemple un peuple sur un territoire donné (la France en l’occurrence), j’estime que le "grand principe" qui s’impose à ce peuple s’appelle le Bien Commun ! Et pour préserver ce Bien Commun, je ne vois pas d’autres solutions que de redéfinir une nouvelle Constitution (c’est l’objet de mes derniers échanges avec MaQiavel ci-dessus) -
Qaspard Delanuit 23 juin 2014 18:30
Définir une nouvelle Constitution, c’est le chantier mis en oeuvre par Etienne Chouard.
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maQiavel 23 juin 2014 19:14
Il y’ a une grande différence entre une constitution faites pour et par les hommes et une constitution émanant d’un principe supérieur et extérieur à l’humanité.
Sur l’origine des lois
Démocrite :« Le droit est une invention des hommes » DL « Les lois n’interdiraient pas à chacun de vivre selon son penchant si les gens ne se faisaient pas tord mutuellement » DK B-CCXLV
Platon :« Est-ce un dieu, étrangers, ou un homme à qui vous rapportez l’établissement de vos lois ? C’est un dieu, étranger, oui, un dieu » Lois, I, 624a
En ce qui me concerne, cette histoire de lois descendant du ciel , c’est une mythification , une technique d’ ingénierie sociale , de manipulation qui vient :
-Soit d’un individu ou d’une caste dominante à son propre profit
-Soit d’une personne bien intentionné qui souhaite manipuler les hommes par le « pieux mensonge »pour les amener se conduire avec vertueusement.
« Il n’a jamais, en effet, existé de législateur qui n’ait recours à l’entremise de Dieu pour faire accepter des lois nouvelles, et qui, il faut l’avouer, étaient de nature à n’être point reçues sans ce moyen ». Machiavel
P.S : Le manipulateur peut croire sincèrement à sa propre manipulation évidemment
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micnet 23 juin 2014 19:25
MaQ, je suis tout à fait d’accord mais il faut préciser que, depuis 2 siècles et demi maintenant, le nouveau dieu que l’on vénère et celui à partir duquel nous établissons des lois, même internationales s’appellent l Homme !
Toutes les Constitutions des pays démocratiques se réfèrent à la Charte des Droits de l’Homme.Cette situation est-elle préférable à la situation antérieure lorsqu’ un hypothétique Dieu faisait office d’autorité suprême ? A chacun de juger... -
maQiavel 23 juin 2014 19:50
@micnet
- il faut préciser que, depuis 2 siècles et demi maintenant, le nouveau dieu que l’on vénère et celui à partir duquel nous établissons des lois, même internationales s’appellent l Homme !
Ce n’ est pas ainsi que je vois les choses. Les lois sont établies au profit de certains hommes , l’ élite économio- politique.
-Toutes les Constitutions des pays démocratiques se réfèrent à la Charte des Droits de l’Homme.
Je ne connais aucun pays démocratique de nos jours , mais en ce qui concerne les droits de l’homme il faut lire les critiques socialistes :les droits de l’homme sont une émanation de la classe bourgeoise et existznt au profit de cette classe
http://www.marxisme.biz/marx/droits-de-lhomme.html
-Cette situation est-elle préférable à la situation antérieure lorsqu’ un hypothétique Dieu faisait office d’autorité suprême ?
A cette situation , je préfère des lois faites , non pour une minorité d’ individus mais pour le collectif humain …
Le Dieu hypothétique qui fait autorité suprême , c’est potentiellement très dangereux , bien plus dangereux que la situation actuelle (je me suis mit à lire des extraits de Platon , et je remarque qu’Hitler ou Staline étaient des taffioles à coté , si la république idéale de Platon existait durant les années 30, je n’aurais pas hésité à demander l’asile politique à l’ Allemagne nazies ou à l’union soviétique bolchévique , sauf si je faisais partie de la classe supérieure évidemment , là ce serait le paradis , enfin pour une personne qui prend plaisir à dominer les autres hommes … ).
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micnet 23 juin 2014 19:57
@MaQ"Le Dieu hypothétique qui fait autorité suprême , c’est potentiellement très dangereux , bien plus dangereux que la situation actuelle (je me suis mit à lire des extraits de Platon , et je remarque qu’Hitler ou Staline étaient des taffioles à coté "---> Non MaQ, s’il vous plaît, pas vous. Vous n’allez pas faire comme Jean Robin qui avait interpellé Eric dans un autre fil de discussion avec exactement les mêmes arguments !
Vous qui dénoncez les propagandes d’où qu’elles viennent, je suis surpris que vous n’ayez pas pris plus de recul sur le lien que vous nous avez envoyé (Démocrite/Platon...)Pour le reste, si vous tenez absolument à faire des comptabilités macabres, vous ne pourrez que constater que les totalitarismes du XXè siècle tiennent le haut du panier bien devant toutes les guerres de religion...Non le dieu matérialiste me paraît encore pire que tous les autres -
Éric Guéguen 23 juin 2014 20:05
Mach’, lisez La société ouverte et ses ennemis, une bouse de Popper, ça va peut-être vous plaire dans ce cas. C’est en effet l’un des livres de chevet de Robin.
Et sur le site de Cheminade, on trouve un autre genre de merdes :
Cette fois, c’est Aristote le salopard d’ultra-libéral et Platon le grand sauveur.
Quant à Démocrite, il n’était pas à proprement parler un penseur politique. Il faut lire ce qu’il dit des femmes, Hitler en rougirait également.
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maQiavel 23 juin 2014 20:15
-Pour le reste, si vous tenez absolument à faire des comptabilités macabres, vous ne pourrez que constater que les totalitarismes du XXè siècle tiennent le haut du panier bien devant toutes les guerres de religion... Je ne parle absolument pas de cela. Je dis simplement que la société idéale de Platon ne me convient pas et meme qu’elle me répugne. Je dis que même la société Hitlérienne ou Stalienienne me convient mieux que celle là ( et il y’a par exemple des gens sur ce site qui aiment ces sociétés là , ce n’est pas une question de gentil ou méchant , ils ont le droit , ce n’est juste pas mon truc ) mais c’ est une question de vision du monde …Mais par contre , Robespierre , qu’on accuse aussi de beaucoups de massacres , lui correspond à ma vision du monde , donc ce n’est pas une question de comptabilité macabre , ça c’ est la terre des hommes , et les hommes combattent pour leur idéal et s’ entretuent , je ne vois pas ce que les comptabilités macabres viennent faire là dedans …
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micnet 23 juin 2014 20:25
@MaQ"ce n’est pas une question de gentil ou méchant"---> MaQ, désolé mais votre commentaire précédent s’apparentait plus à un jugement "moral" sur Platon qu’à une critique de fond ! Alors si telle n’était pas votre pensée, dont acte mais je vous assure que vos expressions ("Hitler et Staline étaient des taffioles à côté de Platon"..."répugnant", dangereux), dans ce cas me semblent mal choisies... -
maQiavel 23 juin 2014 20:41
Pourquoi dès l’on fait référence à Hitler ou à Staline (plus Hitler que Staline), systématiquement certains réflexes s’enclenchent ?
Est-ce qu’ils n’étaient pas des êtres humains ? Est-ce qu’ils n’avaient pas des idéaux ?
J’ai personnellement toujours dit que Hitler (prenons le pire des deux dans nos imaginaires) était un grand homme d’Etat et qu’ il travaillait réellement pour la nation Allemande et comme tout homme d’ Etat , il avait des qualités et des défauts ( amplifié à outrance par la propagande moderne antifaschiste complètement délirante ).
Donc lorsque je fais référence à Hitler ou Staline, je ne fais pas référence à ce type de propagande irrationnelle, je fais référence aux hommes d’Etat.
Ce que je n’apprécie pas chez les deux personnages, c’est le degré de soumission exigé dans leurs idéaux, et je constate que chez Platon ce facteur est décuplé, c’est tout à fait logique que je trouve cela répugnant vu que j’ai un tempérament anarchiste, mais c’est mon point de vue …
Enfin bref , ce n’est pas la première fois , je me demande quand est ce qu’on pourra parler d’ Hitler tranquillement , parce que je remarque que plus on s’ éloigne de la sacro sainte shoah , plus le personnage déclenche des réflexes pavloviens …
Donc je parle du degré de soumission qui est une caractéristique sociétale importante chez moi, et non pas de comptabilité macabre, de qui est plus gentil que qui et qui est le plus méchant , politiquement ça ne veut rien dire ça …
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micnet 23 juin 2014 20:51
@MaQ
Bon oublions Hitler et Staline 30 secondes car même si c’est vous qui les avez évoqués en premier, je n’aurais pas dû rebondir dessus, surtout que ce n’était pas là-dessus que je voulais vous interpeller...Non la question de fond que je vous posais (et à laquelle je n’ai pas eu de réponse), tient au fait que vous, si sourcilleux (à raison) de toute forme de propagande quelle qu’elle soit n’ayez pas pris la peine de relativiser le lien sur Démocrite et Platon. Je ne vous apprendrai pas qu’il n’y a rien de plus facile que d’extraire des phrases d’un contexte.Bref, vous êtes-vous renseigné sur la provenance de ce lien ? -
maQiavel 23 juin 2014 21:04
Oui, évidemment que c’est un lien défavorable à Platon, la question ne se pose même pas.
Mais les citations sont bien de lui, non ? Et puis il y’a votre article …
De plus, même si je connais très peu Platon, j’ai tout de même quelques notions, et je n’ai jamais aimé le niveau de servilité qu’il exige des hommes en société, c’est radicalement opposé à ma vision du monde.
Je comprends très bien qu’il n’ait pas apprécié la démocratie Athénienne (et l’inverse m’aurait inquiété à vrai dire).
Et ce qui m’étonne, c’est que ce soit Machiavel qui soit diabolisé dans nos sociétés modernes.
Cela n’empêche pas que je puisse le trouver intéressant sur certains thèmes ésotériques , mais du point de vue sociétal , non. Un tel niveau de soumission ? Même dans Game of thrones , aucun personnage ne va aussi loin ( voilà comme ça on ne parle plus d’ Hitler ) ...
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micnet 23 juin 2014 21:13
@MaQ"Et ce qui m’étonne, c’est que ce soit Machiavel qui soit diabolisé dans nos sociétés modernes."---> Sincèrement, Platon aussi est diabolisé dans beaucoup de milieux (contrairement à Aristote)Sinon, puisque vous évoquez aussi les citations de mon article, dans ce cas, pourquoi ne retenez-vous pas celle-là :"Eh bien ! c’est ce gouvernement si beau et si juvénile qui donne naissance à la tyrannie. (…) Ainsi, l’excès de liberté doit aboutir à un excès de servitude, et dans l’individu, et dans l’Etat. "---> Platon indique ainsi combien il avait peur de la "tyrannie" qu’il attribuait (à tort ou à raison) aux conséquences inhérentes à la Démocratie. Platon aura été un témoin de son temps, de la guerre et de la déchéance d’Athènes, de la mort de son maître Socrate, et aussi de la tyrannie, la vraie (cf régime des Trente).Il estimait donc qu’un excès de liberté aboutit à un excès de servitude ! D’où un certain autoritarisme nécessaire...afin d’éviter le totalitarisme !C’est en tout cas la lecture que j’en ai ! -
Éric Guéguen 23 juin 2014 21:39
Je peux vous assurer que, sans être littéralement "diabolisé", Aristote est souvent tourné en ridicule. Ça a toujours été le modèle auquel se confronter et, en définitive, à abattre.
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maQiavel 23 juin 2014 21:40
-Platon indique ainsi combien il avait peur de la "tyrannie"
Oui d’ accord mais , que propose –t-il à la place ?
Dans le lien en question , je lis par exemple « Platon n’imagine pas que l’on puisse être juste sans une autorité placée au-dessus de soi : « Personne n’est juste volontairement, mais par contrainte » République, II, 360c « Si quelqu’un recevait cette licence dont j’ai parlé [le pouvoir de devenir invisible et d’échapper à la justice], et ne consentait jamais à commettre l’injustice, ni à toucher au bien d’autrui, il paraîtrait le plus malheureux des hommes, et le plus insensé, à ceux qui auraient connaissance de sa conduite » République, II, 360d (l’anneau de Gygès).
Note : pour Platon, la justice c’est l’ordre et l’injustice le désordre, car l’individu n’a pas de libre-arbitre (Timée, 86-87) et fait le mal involontairement, d’où l’utopie autoritaire de placer les hommes dans une société fermée et surveillée par des gardiens. »
Sans blague ? Mais qu’est ce que c’est que ça ?
Je peux comprendre qu’une personne avec une vision du monde élitiste et aristocratique défende cette vision du monde utopiste autoritaire, mais comprenez aussi que pour moi avec mon tempérament anarchiste, c’est tout de même flippant, je ne voudrais en aucun cas vivre dans sa cité idéale ( d’ ou ma plaisanterie de demander asile politique dans la Russie bolchévique ou dans l’ Allemagne Nazie )
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micnet 23 juin 2014 21:59
@MaQ"Platon indique ainsi combien il avait peur de la "tyrannie"Oui d’ accord mais , que propose –t-il à la place ?
---> L’aristocratie avec son corollaire "un peu" de contraintes afin d’éviter un "excès" de contraintes
Dans le lien en question , je lis par exemple « Platon n’imagine pas que l’on puisse être juste sans une autorité placée au-dessus de soi : « Personne n’est juste volontairement, mais par contrainte » République, II, "
---> Pour ma part, je suis parfaitement en phase avec cette phrase (qui rejoint notre échange précédent sur la Nature Humaine, etc...)
Je dois vraiment vous faire peur
360c « Si quelqu’un recevait cette licence dont j’ai parlé [le pouvoir de devenir invisible et d’échapper à la justice], et ne consentait jamais à commettre l’injustice, ni à toucher au bien d’autrui, il paraîtrait le plus malheureux des hommes, et le plus insensé, à ceux qui auraient connaissance de sa conduite » République, II, 360d (l’anneau de Gygès).
---> Vous voyez : ça c’est typiquement un exemple de manipulation et de mauvaise foi de ce lien ! Il se trouve que l’épisode dont il est question évoque un long échange de Socrate dans lequel ce dernier essaie de démontrer à son interlocuteur, par l’absurde, que l’injustice est défavorable et il a pris cet exemple de l’anneau qui rend invisible. (pas de chance, je connais ce passage)
Note : pour Platon, la justice c’est l’ordre et l’injustice le désordre, car l’individu n’a pas de libre-arbitre (Timée, 86-87) et fait le mal involontairement, d’où l’utopie autoritaire de placer les hommes dans une société fermée et surveillée par des gardiens. »
Sans blague ? Mais qu’est ce que c’est que ça ?
2 remarques :
1 - Ce sont des "notes" donc des interprétations de la pensée platonicienne
2 - Les "gardiens" en question ne sont pas des gardiens de prison mais les "gardiens de la Cité". Tel est le nom que l’on attribuait aux philosophes, car en effet, ceux-ci étaient censés posséder la sagesse nécessaire afin de bien gouverner
"Je peux comprendre qu’une personne avec une vision du monde élitiste et aristocratique défende cette vision du monde utopiste autoritaire, mais comprenez aussi que pour moi avec mon tempérament anarchiste, c’est tout de même flippant, je ne voudrais en aucun cas vivre dans sa cité idéale ( d’ ou ma plaisanterie de demander asile politique dans la Russie bolchévique ou dans l’ Allemagne Nazie )"
---> Mon cher MaQ, je suis un peu surpris car je vous croyais "’anarchiste-chrétien", c’est à dire soucieux de liberté ET de grandeur. Comme Léon Bloy par exemple, véritable anarchiste et véritable chrétien qui a consacré tout un ouvrage à l’âme de Napoléon (autre grand diabolisé de notre époque)
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maQiavel 24 juin 2014 12:49
@micnet
-Pour ma part, je suis parfaitement en phase avec cette phrase (qui rejoint notre échange précédent sur la Nature Humaine, etc...)Je dois vraiment vous faire peur
---> Cela fait de nous tout simplement des opposants politiques …
- Les "gardiens" en question ne sont pas des gardiens de prison mais les "gardiens de la Cité". Tel est le nom que l’on attribuait aux philosophes, car en effet, ceux-ci étaient censés posséder la sagesse nécessaire afin de bien gouverner
--->De mon point de vue, c’ est pareil , je ne crois pas en cette sagesse des gouvernants , pour moi , c’ est une mystification , une fable , une utopie qui dégénérera de toute façon et cela amène de toute façon aux des gardiens de prisions ou pire de troupeau …
-soucieux de liberté ET de grandeur.
Oui mais qu’est ce que la grandeur ? On n’en a surement pas la même perception, ne pas vivre dans la servilité est pour moi une marque de grandeur …
Spartacus est pour moi l’ un des plus grand homme de tous les temps …
-Comme Léon Bloy par exemple, véritable anarchiste et véritable chrétien qui a consacré tout un ouvrage à l’âme de Napoléon
Je n’apprécie pas particulièrement napoléon ( en tous cas pas dans le bon s sens du terme , c’ est le gredin vicieux que j’ apprécie en lui ), je lui préfère largement Robespierre
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micnet 24 juin 2014 14:58
@MaQ
Bonjour à vous,
Sommes-nous des "opposants politiques" ? C’est possible mais avant de l’affirmer, je tiens absolument à ce qu’on se comprenne bien, notamment sur la notion de "contraintes". J’aimerais vraiment qu’il n’y ait pas de mésinterprétation par rapport à ce que je pense et je vais donc un peu développer ce point.
J’ai l’intime conviction que la contrainte, lorsqu’elle est mesurée et équilibrée (donc absolument rien à voir avec toute forme de totalitarisme) est bénéfique et permet d’accéder à une véritable liberté. C’est également la lecture que j’ai de l’ouvrage majeure de platon, La République.
Je l’ai déja dit mais je le reformule ici (en gras) : je place la Liberté (la vraie, pas cette pseudo-indépendance typiquement moderne) au-dessus de tout ! Mais j’estime que la véritable liberté ne constitue pas un acquis dès la naissance mais qu’elle se conquiert tout au long d’une vie. Elle est un combat de tous les jours, et demande une attention et une vigilance de tous les instants pour ne pas tomber dans le conformisme ambiant, véritable adversaire de cette Liberté.
J’estime que les "petites contraintes" que tout un chacun subit au cours de sa vie nous permettent de grandir, d’acquérir une sagesse et une expérience que celui qui mène une vie dorée ne possède pas. Aujourd’hui, dans nos sociétés individualistes, caractérisées par une permissivité à-tout-va et une pseudo-liberté de façade et dans lesquelles nos enfants sont considérés comme des "enfants-rois", moi honnêtement, je n’ai pas l’impression que les gens soient libres ni même se "sentent libres" (car à défaut d’être libre, on pourrait, à tout-le-moins, avoir l’illusion de la liberté, ce qui n’est même pas le cas...).
En conséquences, j’estime qu’une société qui promeut un minimum (encore une fois)
de valeurs et donc de "contraintes" permet à ses individus d’avoir un cadre et d’acquérir un tempérament suffisamment mature pour avoirVRAIMENT envie de devenir un homme libre. Et, encore une fois, je ne crois pas que Platon enseignait autre chose car il entrevoyait tout simplement le fait qu’un excès de liberté finirait par donner un excès de contraintes pour finir par aboutir à une véritable tyrannie.
Je ne le répéterai jamais assez : tout est question d’équilibre ! (vous voyez, on sort du schéma binaire).
Pour finir, puisque vous me citiez vos modèles de référence (Machiavel, Robespierre) permettez-moi de vous citer les miens : ce ne sont pas Napoléon, ni même De Gaulle (que j’admire évidemment) que je place en premier mais plutôt Socrate (le maître de Platon, faut-il le rappeler) et Jésus-Christ qui représentent tous deux pour moi la quintessence de l’Homme libre, c’est à dire prêt à accepter (et non pas rechercher) la mort si la nécessité s’y présente. 2 personnages qui n’ont jamais cherché à écraser ni même à dominer leur semblable mais qui, au-travers de leurs enseignements et de leur vie, puis de leur mort, furent des précurseurs de ce qu’il est convenu d’appeler la société occidentale
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Éric Guéguen 23 juin 2014 10:46
(1/2) Bonjour Gaspard. Voici ma réponse promise. Je vais essayer d’être concis, mais c’est difficile.
Ceci va me donner l’occasion de montrer à Mach’ pourquoi, à mes yeux, les problèmes politiques qui nous occupent ne sont pas « structurels », mais anthropologiques. Je pars de l’essentiel à mes yeux : l’homme est un animal politique et rationnel. J’ai déjà eu l’occasion de le dire, c’est la seule généralité spécifique que j’établis pour ma part. Le reste est du ressort de l’individuation naturelle. En tant qu’animal, il est astreint à un certain nombre de choses, accomplies par instinct. En tant qu’être politique, il ne peut se développer (dans tous les sens du terme) qu’au travers de vis-à-vis. En tant qu’être rationnel, il est doué de la capacité à se prendre lui-même pour sujet d’étude, ce qui implique un recul inédit dans le règne animal, et non seulement la conscience de soi (qu’il partage avec d’autre animaux), mais également la « conscience de la conscience de soi » qui lui laisse entrevoir une certaine latitude permise vis-à-vis de ses instincts (naturels) premiers. Ainsi l’homme peut-il déroger volontairement au schéma classique, aux « normes » logiques (concaténations, causes à effet) que la nature semble avoir mises en place. Il y a pour lui comme un terrain de jeu entre l’animalité brute de l’homme et un certain seuil au-delà duquel il se perd.
Mais qu’entends-je au juste par « nature » ? Est-ce quelque chose de transcendant ? Un Dieu ? Le hasard aveugle ? Une entité immanente ? Intelligente ? Absurde ? Quel est ce principe ? Peu importe pour ce qui nous occupe, ai-je envie de dire. Ce qui importe, c’est de savoir que l’homme n’en est pas responsable mais qu’il le subit. L’homme n’est pas auto-créé, il n’est pas immortel, il ne s’est pas offert à lui-même le génie dont il dispose ni la « conscience de sa conscience de soi ». À partir de là, chacun peut y voir ce qu’il veut : Dieu, la causalité naturelle ou bien le pur hasard. J’aurais tendance, pour ma part, à réserver à Dieu le rôle d’un spectateur, certes tout-puissant, mais hors de l’histoire et soucieux avant tout de contempler les efforts de l’homme pour s’élever. J’ai beau être catholique par tradition, ma vision sincère de Dieu n’est pas en parfait accord avec cet enseignement. Peu importe. La nature, en revanche, je suis plus catégorique à son sujet : j’appelle donc « nature » tout ce qui rend l’homme contingent, ce qui inclut l’homme lui-même (terrible blessure dans son amour propre) et n’implique pas nécessairement l’intervention d’une entité intelligente. Elle (la nature) lui permet, comme déjà dit, une certaine latitude entre l’instinct aveugle propre à la plupart des animaux et l’hybris qu’il lui faut éviter par l’exercice de sa raison. La démesure des Grecs est non seulement à éviter pour elle-même, mais du fait également que l’ordre des choses se charge bien souvent de rétribuer l’hybris par le juste retour des choses (nemesis chez les Grecs) : conséquences inattendues à trop jouer, par exemple, avec le génome ou l’atome !! Voilà pour ce que je pense être commun à tous les hommes, indistinctement.
À présent, je dois prendre en compte la pluralité des natures, la diversité des êtres au sein de l’espèce. Ainsi n’y a-t-il pas deux individus qui se situeront à un moment quelconque de leur vie à la même distance entre l’animalité brute et la démesure volontaire. Il est fondamental de l’avoir à l’esprit et c’est le grand écueil de l’époque moderne, soucieuse de rendre l’humanité libérée des moindres entraves et en même temps faite d’individus interchangeables. Voilà à mes yeux le grand renversement anthropologique (sur lequel il y aurait encore tout un livre à écrire…) : alors que l’humanité devrait se considérer comme infiniment variée dans une enclave (pur instinct à dépasser en amont, démesure à éviter en aval), elle escompte rendre les êtres interchangeables sans la moindre entrave. Je peux maintenant vous répondre et introduire ce que j’ai dit dans mon article sur Batman… (suite à venir). -
Éric Guéguen 23 juin 2014 11:44
(2/2) Voilà donc à gros traits établies la part du déterminisme chez l’homme et celle de son libre arbitre. Je dois préciser que je peaufine en même temps ma pensée sur ce sujet à mesure que je vous réponds. Je ne veux pas dire que j’improvise, mais que cela me permet de mettre mes idées en ordre.
Alors en quoi tout ce que je viens de dire nous intéresse ? N’est-ce pas une simple digression de ma part ? Non. Averroès, le célèbre philosophe arabe, grand lecteur des Grecs, chouchou des lettrés qui par son biais escomptent promouvoir le génie musulman et l’amitié entre les peuples, distinguait trois types de personnes dans chaque population donnée : les philosophes, les théologiens, le reste (quel humanisme !). Les philosophes (au nombre desquels il se comptait) sont des êtres ayant atteint un certain niveau de sagesse, capables de s’autogouverner et non assujettis aux croyances pures et dures. Les théologiens, eux, (en gros) malgré qu’ils soient conscients du caractère instrumental de la religion, sont astreints à son exercice et à son apprentissage. Le « reste », lui, très mal disposé à s’autogouverner (et Averroès reste sourd aux raisons de ce constat, ce qui est dommage) et enclin à céder à toutes sortes de séditions, devait être rigoureusement maintenu à sa place (entre animalité et démesure) par les dogmes indiscutables. Voyez, c’est typiquement le genre de hiérarchie sociale sclérosée que je déplore… mais que je comprends. Il y a beaucoup à en dire, et beaucoup en a déjà été dit en commentaires de mon article sur l’extrait de l’homme chauve-souris.
Ceci nous amène à parler d’éthique et de morale, relativement à la caractéristique médiane de l’être humain : il est animal (limite basse), rationnel (limite haute), mais aussi élément singulier d’une communauté politique, et donc astreint à certaines règles de vie commune. Il lui appartient de s’enquérir de lui-même de comportements sains, volontairement et d’être ainsi un individu éthique, responsable, ou bien de s’en remettre à des corpus de lois ou à des prêtres qui lui rappelleront constamment les garde-corps au bord de l’hybris, sans jamais avoir la satisfaction d’être autonome, autogouverné. Ce dernier est l’individu moral, consentant ou non. L’éthique part de l’un et s’élève volontairement vers le multiple, la morale est le produit du multiple et s’abat sur l’un déréglé. Pour Averroès, les sujets moraux sont bien plus nombreux que les sujets éthiques. Le philosophe est celui qui n’a plus besoin de lois (et c’est tant mieux parce qu’elles sont loin d’être toutes bonnes), il est sorti de la caverne (la cité). Il n’en a plus besoin non parce qu’il a pris le pouvoir et fait ce qui lui plaît (il serait alors à son tour dans l’hybris), mais parce qu’il a intégré et qu’il assume sa nature animale, sa condition politique, sa vocation rationnelle.
Relativement à la diversité des caractères dont je faisais étant plus haut, et même les changements de caractères et de capacités chez un seul individu tout au long de sa vie, comment donc prétendre s’en remettre à la sécheresse et à la rigidité d’un corpus de droit positif, fût-ce des droits de l’homme complaisants ? Chaque loi établie, selon moi, n’est pas une victoire, mais une défaite du grand dessein démocratique si celui-ci espère un jour voir vivre des communautés d’individus responsables et autogouvernés. Une telle échéance verrait, en définitive, la fin de la nécessité politique. Mais nous savons vous et moi que cela n’adviendra jamais, qu’un individu éminemment éthique n’engendre pas nécessairement des semblables, et que la sagesse ne passe pas dans les gènes. Tout est à refaire pour chaque individu, le progrès a difficilement prise là-dessus. Donc ? Eh bien donc un carcan minimal (Dieu et les lois) sera toujours de mise, indexé sur non sur les comportements des individus les plus éthiques, mais sur ceux des individus les moins moraux, quel que soit le nombre de ces brebis galeuses. En outre, je prétends, certes pompeusement, que si ce que je viens de décrire était enseigné aux enfants, au rebours de la célébration égalitariste de commande, nous serions déjà mieux armés pour résoudre les problèmes qui ne cesseront d’émerger des communautés humaines.Bien à vous,
EG
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Qaspard Delanuit 23 juin 2014 15:17
Bien, Eric, mais alors diriez-vous que le principe directeur du "moins mauvais des systèmes politiques possibles" est selon vous :
- immanent (dans la nature humaine)- ou transcendant (extérieur à la nature humaine) ? -
Éric Guéguen 23 juin 2014 16:24
Je dirais que la logique du "moins mauvais des régimes" table sur l’uniformité de la nature humaine, toute encline au même degré à l’hybris, au désordre éthique. Plus encore, elle fait du pire bipède un standard pour toute la planète afin, dit-elle, de nous éviter les déconvenues. J’ai eu aussi l’occasion de le dire : le régime représentatif actuel a déjà été fondé d’après cette logique du moindre mal, et Michéa en a même fait un bouquin. Ce principe table sur la politique comme mal nécessaire quand j’y vois pour ma part la plus belle expression de notre nature en partage, malgré tous les désagréments que cela induit.
Mais pour répondre tout de même à votre question, tant bien que mal, je dirais qu’avec une vraie transcendance - un Dieu, pas de menus droits de l’homme éthérés - un tel principe serait déjà plus efficace. Encore une fois, cependant, je ne me place absolument pas dans cette optique. Et ce n’est pas pour autant que j’escompte établir un régime "idéal". Je veux au contraire que l’on appréhende enfin l’humanité à la fois dans son invariance philogénétique et dans sa pluralité ontogénétique, non l’inverse. -
Qaspard Delanuit 23 juin 2014 18:35
Les idées que vous énoncez sont intéressantes, mais je ne vois pas comment les transformer en action politique à partir de la réalité qui est la nôtre ici et maintenant.
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Éric Guéguen 23 juin 2014 19:47
Je pense sur le long terme, Gaspard. À la louche : combien de temps l’individu a-t-il mis pour se désanchâsser de la communauté ? Il lui en faudra peut-être autant pour s’y insérer de nouveau. Je ne travaille ni pour moi, ni pour mes enfants, mais pour les générations successives, ce qui n’est résolument pas démocrate. C’est bien plus généreux que ça. Je pense que vous pourrez être sensible à cela.
Concrètement, il faudra attendre que tout s’effondre avant de pouvoir se faire entendre. Disons 2020, pas avant. -
Qaspard Delanuit 23 juin 2014 20:01
"Concrètement, il faudra attendre que tout s’effondre avant de pouvoir se faire entendre."
Oui, c’est probable. Une réforme en profondeur ne semble plus possible, pas défaut de conscience des individus. Il y a une sorte de plongeon dans l’inertie politique depuis les années 1980 (avant c’était plutôt un aveuglement).Il faut cependant préparer une renaissance de l’histoire, un redémarrage du temps politique. Nous ne le verrons pas de notre vivant, mais nous pouvons en être les annonciateurs, en creuser les fondations. -
Éric Guéguen 23 juin 2014 20:07
C’est, de fait, ce que nous sommes Gaspard. Sans rire.
Les citoyens dans notre genre ne sont pas légion.
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maQiavel 23 juin 2014 18:59
- La question porte sur la reconnaissance éventuelle d’une autorité politique extérieure à l’humanité et non sur le fait qu’il puisse exister un principe ou des êtres supérieurs à l’humanité.
C’ est une distinction très importante.
En ce qui me concerne , je serais très terre à terre :
1.Je crois en l’ existence d’ un principe supérieur à l’humanité ( Dieu ).
2.Je ne crois pas en l’ existence d’ un principe politique extérieur et supérieur à l’humanité.
Dès le départ , je diverge de Gueguen et de micnet : je ne crois pas que l’ homme soit un animal politique.
Mais tout dépend de ce que l’ on apelle politique , en ce qui me concerne , c’est la organisation de l’Etat pour qu’il soit puissant et sécurisé afin de permettre l’essor d’une vie civile prospère et harmonieuse régies par des lois et des institutions politiques observés par l’ensemble des citoyens.La politique se fonde avant tout sur la gestion des rapports de domination.
En tant que chrétien , je crois que le principe supérieur à l’humanité a laissé l’homme libre de s’ organiser politiquement comme il le souhaite , il ne s’ en préoccupe pas ( « Rendez à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu ». Marc, XII, 13-17).
Donc la question de l’organisation politique est avant tout humaine , c’ est l’ homme qui est au centre de la politique.
On peut considérer que c’ est un point de vue humaniste mais cela ne veut pas dire pour autant qu’il est individualiste , puisque une politique peut s’ axer sur le bien etre ( notion relative s’ il en est ) de la communauté /société (l’ approche collectiviste ) ou sur le bien etre des individus d’ une société ( l’approche individualiste ).
Mais je pense par contre que l’homme est un animal culturel ( qui concerne la réelle expression de l’aspiration d’un peuple, la potentialisation de sa sensibilité et de son génie ou encore l’actualisation optimale du potentiel humain à l’horizon d’un perfectionnement intérieur ).Et du point de vue culturel , je crois qu’ il y’a évidemment un principe sur plombant , malgré la grande diversité des cultures.
Concernant la question de l’ égalité , la question doit se poser en politique l’Etat ayant le monopole de la force légitime, la question de son contrôle se pose , la règle doit donc être l’égalité de tous devant la loi, le respect des libertés fondamentales et surtout la limitation stricte des pouvoirs de ceux qui l’exercent, afin d’éviter les abus de pouvoir et la prise en otage de la commuinauté par une classe dirigeante. Par contre , cette question de l’égalité du point de vue culturel , ,ne se pose pas : étant donné qu’ il existe un principe supérieur , la culture ne peut pas être fondée sur le principe d’égalité, tout ne se vaut pas culturellement.-
Éric Guéguen 23 juin 2014 19:36
Animal politique = condamné à vivre en communauté, en polis. Rien de plus. Et c’est le plus bel argument contre la professionnalisation : un "homme politique" est un pléonasme. Mais si l’homme est animal politique, il est social avant d’être individu. Ça change pas mal de choses, en particulier ce dont parle micnet plus bas : la pertinence de "droits de l’homme".
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maQiavel 23 juin 2014 20:06
@Gueguen
-Animal politique = condamné à vivre en communauté, en polis. Rien de plus.
---> Le grec politikè qui signifie : science des affaires de la Cité. La politique est donc l’organisation de la Cité ou de nos jours l’État.
Dans le sens moderne, c’est ce qui a rapport aux affaires publiques, au gouvernement d’un Etat ou aux relations mutuelles des divers Etats.
De ce point de vue la professionnalisation de la politique a un sens, ce sont les spécialistes qui gèrent les affaires courantes …
L’homme est un certainement un animal social mais le social a lui-même une dimension politique, culturelle et économique.
Concernant le fait que l’homme soit social avant d’être un individu je suis d’accord et deux problèmes se posent :
1. Ceux qui se pensent individus avant d’être la partie d’un tout social, je ne vais m’étendre là-dessus, c’est votre marotte.
2. Ceux qui se pensent individus, mais qui instrumentalisent un social ou un commun, pour servir leurs intérêts individuels.
Moi je suis pour un commun, mais il faut bien s’entendre à ce que ce commun ne cache tout simplement pas le désir de domination d’individus sur les autres (ce qui est le pire des individualismes).
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Éric Guéguen 23 juin 2014 20:34
Concernant le fait que l’homme soit social avant d’être un individu je suis d’accord et deux problèmes se posent :
1. Ceux qui se pensent individus avant d’être la partie d’un tout social, je ne vais m’étendre là-dessus, c’est votre marotte.
=> Les libéraux, incultes et mesquins.
2. Ceux qui se pensent individus, mais qui instrumentalisent un social ou un commun, pour servir leurs intérêts individuels.
=> Les socialistes, hypocrites et inconséquents.
"Moi je suis pour un commun, mais il faut bien s’entendre à ce que ce commun ne cache tout simplement pas le désir de domination d’individus sur les autres (ce qui est le pire des individualismes)."
=> Je suis d’accord. Je ne me cache nullement ce risque.
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micnet 23 juin 2014 19:29
@tous
Tiens, à ce stade du débat, autant mettre les pieds dans le plat au-travers de la question suivante : estimez-vous que les "Droits de l’Homme" doivent continuer à tenir lieu de référence suprême pour les Occidentaux, tant sur le plan national qu’international ?-
Qaspard Delanuit 23 juin 2014 20:11
Ma réponse sera : OUI MAIS
Oui parce que je pense que la recherche d’un sens de la justice commun à toute l’humanité est un projet nécessaire et même inévitable étant donné la vitesse de circulation des idées, des marchandises et des personnes. La question se pose de toute façon.Mais il ne s’agit pas d’imposer les valeurs d’une partie du monde à une autre. Par conséquent, il faut trouver la définition d’une intuition de la justice commune à tous les hommes qui n’est peut-être pas exactement celle que nous avons actuellement. -
Qaspard Delanuit 24 juin 2014 07:40
J’ajoute que le principal problème posé par les "droits de l’homme" est qu’il s’agit d’une notion relevant d’abord de la philosophie et non d’abord de la politique. Par conséquent, la question d’une universalité des droits de l’homme - ou tout simplement d’une humanité universelle - doit être discutée entre philosophes de contrées et de cultures différentes.
De ces débats pourrait éventuellement sortir une déclaration "universelle", ou pour le moins "commune" à l’humanité.Par exemple, plutôt que de critiquer un pays au nom des droits de l’homme, puis d’envoyer des bombes sur sa population, d’occuper militairement son territoire, de traquer et assassiner ses dirigeants, et de piller ses ressources... il serait plus "civil" de proposer des rencontres internationales de philosophie en vue de définir à moyen ou long terme ce que pourrait bien être une déclaration des droits de l’homme véritablement commune à toute l’humanité.A ces conférences participeraient la Chine, l’Iran, Israël, la France, ou plus exactement des philosophes proposés par ces nations...Il va sans dire que ces rencontres devraient être retransmises en direct et mondiovision sur tous les écrans (plus efficacement encore que les matchs d’un mondial de football). -
Éric Guéguen 24 juin 2014 09:32
Je vous trouve un peu angélique sur ce coup-là, Gaspard.
Et pourquoi ne pas plutôt bannir le mot "droit" du vocabulaire philosophique ? Pourquoi ne pas lui substituer le mot "nécessité" ?
Ainsi y aurait-il deux nécessités majeures : la nécessité philogénétique (je sais, je suis lourd avec ça) de chercher à se reproduire, et la nécessité ontogénétique (idem) de chercher à se sustenter.
Autrement dit, de tels comportements seraient réputés "naturels", propres à l’espèce, et ne pas les reconnaître serait par conséquent "contre-nature". Concrètement, seraient considérées comme des aberrations aussi bien le fait de vouloir empêcher qu’une lignée ethnique se perpétue dans le temps que celui de vouloir empêcher un être humain, quel qu’il soit, de satisfaire ses besoins biologiques (dans lesquels par exemple n’entrent pas, faut-il le rappeler, la possession d’un I-Phone 5 ou d’une paire de Louboutin). -
Éric Guéguen 24 juin 2014 09:52
De manière général, et pour compléter ce que je viens de dire, je pense qu’il serait à la fois plus assuré, plus logique et plus pérenne de considérer les choses sous l’angle des "déterminismes" et non sous celui des "droits".
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Éric Guéguen 24 juin 2014 10:04
Lorsqu’une personne subit quelque chose dont elle n’est pas responsable, ce n’est pas elle qui a "le droit" d’être secouru, c’est une idiotie car ça ne dit rien de qui doit s’y coller. C’est plutôt sa communauté qui a "le devoir" d’intervenir pour l’aider. "Arguties !" dirons certains. Moi j’y vois une cohérence élémentaire.
Le droit est centrifuge et porte au "social", le devoir est centripète et porte au "commun".
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Qaspard Delanuit 24 juin 2014 10:15
Je n’ai rien à opposer à ces éléments, qui pourraient être versés au débat dont je parle plus haut. Dans le cas où il existerait une conférence mondiale sur ce qui est le propre de l’homme et donc ce qui est commun à l’humanité, rien n’obligerait à poser la question uniquement en termes de "droits", effectivement.
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maQiavel 24 juin 2014 12:54
- je pense que la recherche d’un sens de la justice commun à toute l’humanité est un projet nécessaire et même inévitable étant donné la vitesse de circulation des idées, des marchandises et des personnes. La question se pose de toute façon.
Mais il ne s’agit pas d’imposer les valeurs d’une partie du monde à une autre. Par conséquent, il faut trouver la définition d’une intuition de la justice commune à tous les hommes qui n’est peut-être pas exactement celle que nous avons actuellement.
Par conséquent, la question d’une universalité des droits de l’homme - ou tout simplement d’une humanité universelle - doit être discutée entre philosophes de contrées et de cultures différentes.
De ces débats pourrait éventuellement sortir une déclaration "universelle", ou pour le moins "commune" à l’humanité.
---> Je suis d’ accord avec vous Qaspard. Ce serait le seul moyen pour décréter qu’une valeur est universelle ou pas …
Et il faudrait répéter ce genre de conférence tous les 50 ans, pour voir comment évolue cette perception de l’universel …
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Qaspard Delanuit 24 juin 2014 20:16
"Et il faudrait répéter ce genre de conférence tous les 50 ans, pour voir comment évolue cette perception de l’universel …"
J’ai hésité a rajouter cette précision, mais oui, c’est évident.
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maQiavel 24 juin 2014 13:44
Sinon, j’aimerai revenir sur l’utopisme autoritariste et/ou aristocratique.
Je comprends très bien le postulat de base : les hommes sont incapables de se gouverner, il faut donc extraire un échantillonnage de l’humanité qui serait constitué de gens qui en seraient eux capable.Et lorsque l’on part de ce point de vue, on se dit que pour que les choses fonctionnent, il faut donner une dimension hiérarchique au commun.
En ce qui me concerne, c’est une fable, un conte pour enfants, voir dans le pire des cas une mystification.
Mais tout part de ce dualisme dont Qaspard a fait référence plus haut :
1. L’humanité se gouverne elle-même.
2. L’humanité est gouvernée par un principe étranger et supérieur à elle-même.
En ce qui me concerne le pouvoir politique n’est pas un produit de la nature, c’est une construction sociale qui est apparu à un moment donné de l’histoire de l’homme.
Ainsi parle-t-on d’une infrastructure politique (de pouvoir ou de puissance) exactement comme l’on parle d’une infrastructure routière ou ferroviaire, c’est-à-dire un cadre contraint auquel on doit se prêter, dont on ne peut dépasser les limites, qui impose lui-même les conditions de déplacement, etc., – bref qui règne…
Personne ne peut se rendre maître du pouvoir, c’est le Pouvoir qui finit toujours par dominer pour lui-même, il est autotélique.
Cela ne veut pas dire que le pouvoir est mauvais ou bon , tout dépend de comment on définit ce qui est bon et ce qui est mauvais , et tout dépend des bases sur lesquelles le pouvoir est construit , mais il y’ a un principe déterminant : le pouvoir corrompt et s’ étend jusqu’ à ce qu’ il trouve une limite.
De ce point de vue, l’idéalisme aristocratique est une niaiserie, tout régime aristocratique dégénère nécessairement en oligarchie puis en Tyrannie, ce processus a lieu tôt ou tard, quelque soit la qualité des gouvernants.
Lorsque l’on a cette perception des choses, penser qu’il suffit de remettre le commun au gout du jour avec une certaine dimension aristocratique pour que les choses rentrent dans l’ordre est naïf et même très dangereux comme tous les idéalismes (y compris démocratique).
Il est donc vain de chercher un/ des homme (s) providentiel( s)avec de bonnes valeurs méritant notre confiance, mais qu’il est nécessaire en revanche de trouver une organisation qui prévoit la possibilité de se libérer de n’importe quel excès de pouvoir
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maQiavel 24 juin 2014 13:45
« 1984 » d’Orwell , dans un dialogue entre O’ Brien membre du parti, et Winston qui se fait torturer :
O Brien : Et maintenant, revenons à la question « comment » et « pourquoi ». Vous comprenez assez bien
comment le Parti se maintient au pouvoir. Dites-moi maintenant pourquoi nous nous accrochons au pouvoir. Pour quel motif voulons-nous le pouvoir ? Allons, parlez !
Winston : Vous nous gouvernez pour notre propre bien, dit-il faiblement. Vous pensez que les êtres humains ne sont pas capables de se diriger eux-mêmes et qu’alors…
O Brien : C’est stupide, Winston, stupide (…) ! Je vais vous donner la réponse à ma question. La voici :
Le Parti recherche le pouvoir pour le pouvoir, exclusivement pour le pouvoir. Le bien des autres ne l’intéresse pas. Il ne recherche ni la richesse, ni le luxe, ni une longue vie, ni le bonheur. Il ne recherche que le pouvoir. Le pur pouvoir. Ce que signifie pouvoir pur, vous le comprendrez tout de suite. Nous différons de toutes les oligarchies du passé en ce que nous savons ce que nous voulons. Toutes les autres, même celles qui nous
ressemblent, étaient des poltronnes et des hypocrites.
« Les nazis germains et les communistes russes se rapprochent beaucoup de nous par leur méthode, mais ils n’eurent jamais le courage de reconnaître leurs propres motifs. Ilsprétendaient, peut-être même le croyaient-ils, ne s’être emparés du pouvoir qu’à contrecœur, et seulement pour une durée limitée, et que, passé le point critique, il y aurait tout de suite un paradis où les hommes seraient libres et égaux.
« Nous ne sommes pas ainsi. Nous savons que jamais personne ne s’empare du pouvoir avec l’intention d’y renoncer. LE POUVOIR N’EST PAS UN MOYEN, IL EST UNE FIN. On n’établit pas une
dictature pour sauvegarder une révolution. On fait une révolution pour établir une dictature. La persécution a pour objet la persécution. La torture a pour objet la torture. Le pouvoir a pour objet le pouvoir. Commencez-vous maintenant à me comprendre (…) ? Nous sommes les prêtres du pouvoir, dit-il. DIEU C EST LE POUVOIR (…).Le réel pouvoir, le pouvoir pour lequel nous devons lutter jour et nuit, est le pouvoir, non sur les choses, mais sur les hommes. Comment un homme s’assure-t-il de son pouvoir sur un autre, Winston ?
Winston : En le faisant souffrir
O Brien : Exactement. En le faisant souffrir. L’obéissance ne suffit pas.”
Dans cet extrait Orwell illustre le fétichisme du pouvoir. On exerce le pouvoir pour le pouvoir et on s’assure de son propre pouvoir en faisant souffrir ce qui ramène aussi à Nicolas Machiavel : « En effet on trouve dans chaque Etat deux humeurs différentes : il s’en suit que le peuple désire n’être pas commandé ni opprimé par les grands et que les grands désirent commander et opprimer le peuple ».
D’ où la proposition de Machiavel : « le peuple, quand il fait des magistrats, doit les créer de manière qu’ils aient lieu d’appréhender, s’ils venaient à abuser de leur pouvoir ».
Et on débouche sur les propositions de Chouard …
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Qaspard Delanuit 24 juin 2014 20:24
"Personne ne peut se rendre maître du pouvoir, c’est le Pouvoir qui finit toujours par dominer pour lui-même, il est autotélique."
C’est pourquoi l’anneau de pouvoir de Sauron ne peut être utilisé pour le bien commun, même par une personne bien intentionnée. Il doit seulement être détruit par la renonciation à s’en servir. Alors, tout ce qui a été construit par son pouvoir s’écroule. -
Qaspard Delanuit 24 juin 2014 20:32
"Il est donc vain de chercher un/ des homme (s) providentiel( s)avec de bonnes valeurs méritant notre confiance, mais qu’il est nécessaire en revanche de trouver une organisation qui prévoit la possibilité de se libérer de n’importe quel excès de pouvoir"
C’est ce que dit Karl Popper, en se fondant d’ailleurs sur ses recherches sur la théorie de la connaissance en science : mettons au point un système qui permettrait de se prémunir même contre un tyran complètement dingue.La politique n’est pas l’exercice du pouvoir (ça, c’est facile) mais l’art de nous prémunir de l’exercice du pouvoir. -
maQiavel 24 juin 2014 20:45
-C’est ce que dit Karl Popper
Oui, c’est exactement à lui que je faisais référence sans le citer …
-C’est pourquoi l’anneau de pouvoir de Sauron ne peut être utilisé pour le bien commun, même par une personne bien intentionnée.
C’est une très belle illustration. On pourrait aussi parler du trône de fer qui devrait servir que le bien commun mais qui dans les faits existe pour détruire , dominer et ravager , changer les occupants de ce trône ne change rien , quel que soit leur intention …
Ça me rappelle vaguement d’ un conte africain qui parle de la même manière d’ un tam tam magique ...
-La politique n’est pas l’exercice du pouvoir (ça, c’est facile) mais l’art de nous prémunir de l’exercice du pouvoir.
Une phrase qui me convient parfaitement !
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Qaspard Delanuit 24 juin 2014 20:47
Supposons qu’un navire échoue sur une île inconnue et livre à eux-mêmes une centaine d’être humains
Très rapidement, les violents-rusés chercheront à prendre le pouvoir. Ce sont les voleurs de pouvoir, correspondant à nos politiciens professionnels.Les idiots (la population) espéreront que les voleurs de pouvoir seront gentils, allant même jusqu’à imaginer qu’ils sont désignés par la Providence ou bien que c’est eux, les idiots, qui les ont choisis pour maîtres à cause de leurs compétences à gouverner.Les sages-valeureux chercheront à limiter le pouvoir des rusés-violents. -
micnet 24 juin 2014 21:06
@MaQ et Qaspard
Bonsoir messieurs,Encore une fois, je vais prendre à contre-pied une idée assez répandue et qui, d’après moi, tient plus de l’angélisme d’aujourd’hui que de la rationalité.Cette idée (encore une fois propre à la gauche) c’est de dire : "le pouvoir c’est maaaal !"Est-ce que le pouvoir corrompt ? Peut-être, peut-être pas. Rien n’est démontré là-dessus. (Moi je prétends que l’être humain est corrompu dès l’origine. Le pouvoir n’étant qu’un révélateur tout au plus).Tous les grands Hommes, je dis bien "tous’, c’est à dire ceux qui ont le mieux servi le "Bien Commun", étaient des assoiffés de Pouvoir !Mais j’ai remarqué que c’est aussi un classique de notre époque moderne dévirilisée que de diaboliser les ambitieux ! Critiquer la soif de pouvoir, c’est contribuer à accréditer l’idée que les hommes, globalement sont bons, gentils... mais que le Pouvoir les rend "méchants" !Encore une fois, MaQ, on en revient à nouveau à l’idée que l’on se fait de l’Homme...Faux problème que la critique de l’exercice du Pouvoir en vérité... -
maQiavel 24 juin 2014 21:31
@Qapard
-Supposons qu’un navire échoue sur une île inconnue et livre à eux-mêmes une centaine d’être humains Très rapidement, les violents-rusés chercheront à prendre le pouvoir.
J’ai lu que dans ce genre de situation ce sont les personnalités psychopathes (dans le sens psychiatrique du terme) qui ont un avantage, de par leur ingéniosité, leur capacité d’adaptation et leur manque d’empathie.
C’est ce qui est arrivé sur l’Iles aux cannibales, Staline a fait déporter des prisonniers dans une iles à défricher, il ‘y avait dans le lot des prisonniers politiques , des vagabonds mais aussi des criminels endurcit qui ne se connaissaient pas mais qui ont réussit à s’ organiser dès qu’ ils étaient dans le bateau.
Arrivé sur l’Iles, ils ont pris le pouvoir sur les autres déportés et se sont mit à les dévorer (puisqu’ il n’ avait pas de nourriture sur l’ iles).
Je n’ ai pas le lien mais je me rappelle que selon une analyse les personnalités psychopathes sont en général sur représentés dans les classes sociales supérieures !
@micnet
-Tous les grands Hommes, je dis bien "tous’, c’est à dire ceux qui ont le mieux servi le "Bien Commun", étaient des assoiffés de Pouvoir !
Ceux que je considère comme de grands hommes politique n’étaient pas des gens assoiffés de pouvoir …
Et je ne connais pas d’ assopiféer de pouvoir qui ont servit le Bien commun ( à moins que le bien commun soit autre chose que l’ idée que je m’ en fait ) , ils se servent eux-mêmes avant tout , ce sont les plus grands individualistes qu’ il soit …
-Critiquer la soif de pouvoir, c’est contribuer à accréditer l’idée que les hommes, globalement sont bons, gentils... mais que le Pouvoir les rend "méchants" !Encore une fois, MaQ, on en revient à nouveau à l’idée que l’on se fait de l’Homme...
Moi, je ne sais pas si les hommes sont gentils ou méchants, je ne sais pas ce qu’ est la nature humaine , je ne spécule pas dessus , mais je constate du point de vue empirique historique que le pouvoir ne se contrôle pas.
Donc , ce n’ est pas une question de morale.
Je constate aussi qu’il est potentiellement destructeur.
Ce constat pour moi n’est qu’une question de bon sens.
Quant à l’époque dévirilisé, je suis d’ accord mais pour moi la virilité politique n’est pas dominer et asservir les autres, c’ est au contraire se battre contre ceux qui souhaitent dominer et asservir pour être maitre de soi même …
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