samedi 23 juillet 2011 - par Lucadeparis

Brouillon de culture philosophique sur France Inter

Voilà l’été, avec sa littérature de plage, et maintenant, grâce à France Inter, sa philosophie digérée pour des programmes festivals lorsque nous sortons du grand bain, avec des maîtres nageurs qui nous enseignent en huit minutes quoi bien penser.


Ainsi, le vendredi 8 juillet 2011 à 09h50, la présentatrice Sonia Devillers convia Jean-François Braunstein (« philosophe et historien des sciences ») pour nous dire comment être philosophiquement correct vis-à-vis de l’anti-spécisme, Peter Singer et les lois de bioéthique :




21 réactions


  • emphyrio 23 juillet 2011 13:56

    Il faut faire savoir à la stagiaire qu’un phare n’a jamais eu vocation à être suivi mais à signaler les écueils. Ne connaissant pas Singer, j’ai consulté Wiki et je ne reconnais pas sa pensée à travers la caricature qui en est faite ici. J’ai l’impression que la thèse de l’enfant nouveau-né sans conscience de sa propre vie est détournée de son objectif premier. Ne serait-ce pas là une provocation de Singer à l’adresse des partisans de l’avortement ? Si quelqu’un connait ce philosophe, pourrait-il confirmer cette interprétation ?


  • Elisa 23 juillet 2011 14:32

    Attendez, je viens de m’informer un peu sur ce Singer et ma stupéfaction a rejoint une totale indignation.

    Si cet illuminé, adepte de l’infanticide au nom du respect des animaux, se prétend philosophe, il est d’abord totalement inculte.

    Je vous invite à relire Kant et reconnaître en lui le fondement rationnel de notre humanisme.
    Première maxime de la Raison Pratique : "agis de telle sorte que tus considère l’humanité en ta personne et en celle d’autrui toujours comme une fin jamais comme un moyen".

    Je fais très mal la différence entre ce Monsieur Singer et la Théorie raciale de Galton qui a servi de justificatif aux thèses politiques racistes du XX° siècle.

    Ce n’est pas parce qu’un illuminé professe aux Us que cela en fait un penseur respectable.

    On peut évidemment penser ce que l’on veut, cela ne sigifie pas justifier n’importe quoi !


  • Lucadeparis Lucadeparis 23 juillet 2011 16:59

    Elisa, vous faites un contre-sens.

    L’anti-spécisme est à assimiler à l’antiracisme, pas au racisme, qui au contraire, s’assimile au spécisme.

    Vous nous invitez "à relire Kant et reconnaître en lui le fondement rationnel de notre humanisme".

    Je décline cette invitation quasi-religieuse car je ne considère Kant ni comme un prophète ni ses "maximes" comme une resucée des dix commandements divins transmis par un nouveau Moîse des temps modernes.

    Je ne me qualifierais pas d’humaniste mais de personnaliste (que cette personne soit un humain ou d’une autre espèce, terrestre ou extraterrestre).

    Depuis Kant, qui par exemple ne connaissait aucun primate (et encore moins les prédécesseurs préhistoriques de l’humain), l’éthologie a fait de nets progrès pour reconnaître des capacités culturelles et sensibles chez d’autres animaux.

    Effectivement, un chimpanzé (ou un néanderthalien) peuvent avoir plus de capacité qu’un humain anencéphale, et si on fait vivre un humain anencéphale mais pas un chimpanzé, c’est par un spécisme qui nous assimile aux autres humains (on pourrait devenir un humain anencéphale mais pas un chimpanzé), de la même façon qu’un raciste se permet des choses avec d’autres races (esclavage et autres crimes) parce que ce sont des individus d’une autre race dont il lui est impossible de faire partie.

    L’antispécisme n’est pas pour moi un prétexte pour tuer plus d’humains, mais une morale pour plus respecter les autres espèces, par exemple dans ces camps de concentration barbares que sont les élevages industriels.

    C’est très bien que Peter Singer se soit occupé, parce qu’il y était attaché, de sa mère malade d’Alzheimer, dont les capacités intellectuelles et personnelles diminuaient. D’autres personnes aiment leurs animaux de compagnie, et on ne leur reproche pas de ne pas les tuer, et c’est très bien.


  • Lucadeparis Lucadeparis 23 juillet 2011 18:45

    Je constate que mon texte sur la séquence a sauté et par la même occasion de ce qui différencie Agoravox Tv d’Agoravox Fr... Alors je les mets ci-dessous.


  • Lucadeparis Lucadeparis 23 juillet 2011 18:45

    « 

    Il se pose la question de savoir si on peut supprimer la vie d’un fœtus, on doit pouvoir aussi interrompre la vie d’un nouveau-né. Pourquoi...  » Devillers :

    « 

    Il parle d’infanticide légitime. Ca fait totalement froid dans le dos.  »

    Je comprends que les deux interlocuteurs sont pour le droit à l’avortement, comme la majorité des Français dont France Inter ne s’éloigne guère (ou inversement). Mais quel est leur critère pour autoriser l’avortement à dix, ou douze, ou plus de semaines de gestation ? D’autres personnes pensent à propos de l’avortement ce que ces deux-ci pensent de l’infanticide (par exemple beaucoup d’auditeurs de Radio Courtoisie...). N’est-ce pas un critère personnel (la personne étant plus formée), ou d’assimilation (c’est une personne autonome comme moi) ? Vu l’absence d’argument, il ne s’agit ici que d’opinion dominante (soi-disant bien pensance), dont il ne faut pas s’écarter.


  • Lucadeparis Lucadeparis 23 juillet 2011 18:46

    ean-François Braunstein (« 

    philosophe et historien des sciences ») cite Peter Singer :

    « 

    « Seules les personnes lisent des livres de philosophie [rire de la présentatrice Sonia Devillers]. Seules les personnes sont concernées par les arguments moraux et peuvent être convaincus par eux. » C’est pas du tout de l’humour. C’est-à-dire qu’il... ce personnage n’a aucun sens de l’humour ou du ridicule de cette formule :

    « Seules les personnes lisent des livres de philosophie. »

    Elle est littéralement ridicule car elle fait rire inintentionnellement l’animatrice, mais sinon, elle est simplement vraie. J’imagine que Braunstein veut faire l’amalgame (que ferait aussi Devillers avec son rire) avec l’affirmation inverse qui est fausse : 

    « Seuls les

    lecteurs de philosophie sont des personnes. ».


  • Lucadeparis Lucadeparis 23 juillet 2011 18:46

    « C’est toujours des exemples absurdes. Y a un immeuble en feu ; vous êtes pompier ; dans cet immeuble en feu, vous ne pouvez sauver qu’une personne, soit un prix Nobel de Médecine qui va bientôt soigner le cancer, soit votre mère femme de ménage. Qu’est-ce que vous allez faire ? Alors, ce qui est le plus affreux, c’est qu’en fait il faut rajouter "votre mère femme de ménage" parce qu’on suppose qu’au fond, s’il y avait un prix Nobel de Médecine et une femme de ménage, le choix serait vite fait : pour Singer, on sauve le prix Nobel. Ma mère femme de ménage, ça se discute, il faut réfléchir. On sait pas trop. Je pense qu’il choisirait le prix Nobel de Médecine puisqu’il sauvera plus de vies. Donc, si c’est un problème purement quantitatif. Sur tout, le problème, c’est que ça n’existe pas. De telles situations n’existent jamais. On sait bien par exemple que dans la médecine

    de

    catastrophe ou

    d’urgence , que les choix se font sur des critères qui sont beaucoup plus subtils, beaucoup plus fins, beaucoup plus variables ; et l’idée comme ça qu’on pourrait choisir de mettre à mort ou laisser vivre, qu’on peut étouffer.... L’idée-même qu’on peut étouffer un enfant, c’est simplement, je crois qu’on n’a jamais eu un enfant entre les bras. Bon, je ne vais pas faire de sentimentalisme mais pourquoi on n’étouffe pas un enfant ? Ben, parce qu’on n’étouffe pas les enfants. »

    Quels critères subtils, fins et variables ? Les urgentistes prennent des critères vitaux, techniques, et pas du tout moraux : ils vont essayer de sauver le jeune plutôt que le vieux, le plus sauvable que le moins sauvable, et donc peuvent sauver par conséquent un malfaiteur (criminel) plutôt qu’un bienfaiteur.

    S’il avait parlé à des professionnels de la santé, il aurait pu apprendre que l’euthanasie est bien plus pratiquée qu’on ne le dit publiquement, par exemple sur « 

    les comateux irréversibles  » (04:23) ou des « 

    malades atteints d’un Alzheimer ». "Cachez ces pratiques de médecins que je ne saurais voir.", en toute hypocrisie.

    Braunstein fait de la dénégation en disant ne pas vouloir faire de sentimentalisme, car il en fait. Des mères tuent même leur bébé, dont elles viennent d’accoucher, et ça a été en plus médiatisé récemment, surtout depuis l’affaire Véronique Courjault, du nom de la mère dont le mari avait retrouvé le cadavre de deux bébés congelés par son épouse, qui avait déjà tué un premier bébé.


    • requete Requete 23 juillet 2011 22:05

      Bravo lucadeparis, bien vu le rôle religieux de braustein et consors passant leur temps à réinterprêter toute idée trop nouvelle ou trop goye à leur sauce...


  • Lisa Sion Lisa SIon 23 juillet 2011 21:05

    " agis de telle sorte que tu considères l’humanité en ta personne et en celle d’autrui toujours comme une fin jamais comme un moyen ". C’est bien plus parlant que tous les termes complexes dont il faut également apporter la définition afin de les imposer dans tout débat.
    Il suffit de méditer là dessus...


  • requete Requete 23 juillet 2011 22:00

    Comme dans france-culture, ça pullule de garde chiourme religieux et/ou conservateur, à la braunstein...


  • Lucadeparis Lucadeparis 23 juillet 2011 23:49

    Ca m’étonnerait que la majorité des gens trouve cette maxime parlante sans beaucoup d’explications et d’exemples. En tout cas, pas moi.


  • Elisa 24 juillet 2011 12:18

    Et pourtant c’est bien cette maxime qui fonde en droit la déclaration des Droits de l’homme et du citoyen, inspirée de Rousseau et des jurisconsultes hollandais (Grotius en particulier), elle instaure une valeur d’égalité à laquelle chacun peut légitimement se référer .
    En effet l’utilité à laquelle se réfère Singer, dans la lignée philosophique déjà fort ancienne de Bentham, n’est qu’une valeur relative : ce qui est utile pour les uns peut être nuisible pour d’autres, ce qui est utile à un moment donné peut devenir nuisible plus tard et de quel droit une majorité imposerait-elle à une minorité ce qui l’arrange ?

    Que faudrait-il penser d’un pouvoir législatif qui jugerait utile de ne plus rembourser les médicaments à des incurables ou à des personnes de plus de 75 ans ?

    N’oublions pas qu’au nom de la rationalité calculatrice, on a fait travailler des enfants de 7 ans, enfermer des indigents et les contraindre à travailler dans des manufactures, exterminé des homosexuels , des juifs, des gitans ou des communistes, etc..
    On trouve toujours de bonnes raisons utilitaires pour condamner et éliminer au nom de l’intérêt général.


    • Qaspard Delanuit Gaspard Delanuit 24 juillet 2011 12:54

      Il me semble que la Personne échappe au règne de la quantité. Les qualités personnelles ne sont pas comparables parce qu’elles sont de l’ordre de la singularité. Ce qu’on peut comparer et mettre en concurrence est précisément ce qui n’est pas singulier en l’homme. C’est pourquoi une organisation sociale fondée sur une rationalisation de la valeur humaine disant qui doit vivre ou mourir serait parfaitement odieuse pour une société de consciences singulières. 


      Un humanisme non-spéciste (on peut l’appeler personnalisme si on veut) devrait conduire à développer un rapport plus subtil avec les autres formes de vie et non à transformer les sociétés humaines en nids de fourmis. 

    • Lucadeparis Lucadeparis 24 juillet 2011 14:05

      A Elisa :
      Vous prenez encore l’antispécisme à contresens, alors que c’est une extension de l’antiracisme qui faisait déjà qu’on ne devait pas exterminer des gitans ou des juifs.

      "Que faudrait-il penser d’un pouvoir législatif qui jugerait utile de ne plus rembourser les médicaments à des incurables ou à des personnes de plus de 75 ans ?" Qu’il n’est pas gentil, surtout dans un monde aux ressources infinies.

      Que penseriez-vous d’un pouvoir exécutif qui consacrerait un milliard d’euros pour des traitements coûteux destinés à des milliers personnes incurables (nationales, c’est ce que vous ne précisez pas) et n’aurait pas un milliard d’euros pour nourrir des millions d’étrangers qui sont dans la famine ?

      Vous remarquerez que le pouvoir législatif français, soi-disant basé sur la déclaration des droits de l’homme, peut être peu égalitariste entre humains :

      - Des personnes peuvent perdre leurs droits civiques (en étant en prison, ou en étant sous tutelle).

      - Les personnes mineures sont moins des personnes que les majeures (à 17 ans, on n’a pas le droit de vote)

      - Les étrangers ont moins de droits (rien que l’accès au territoire français selon la nationalité de la personne, lorsqu’elle vient d’un pays pauvre surtout).


  • Qaspard Delanuit Gaspard Delanuit 24 juillet 2011 12:41

    En écoutant l’émission, je trouve que l’animatrice et son invité sont bien moins intéressants que les théories prétendument monstrueuses dont ils voudraient nous protéger. 


    Il est évident qu’une notion telle que celle des "droits de l’homme" ne concerne pas l’homme en tant que représentant d’une certaine espèce animale. Si on découvrait une espèce de singes doués de parole et capables de raisonner ne serait-ce que comme un enfant de 5 ou 6 ans, et d’exprimer leur désirs, est-ce qu’on pourrait dire que les "droits de l’homme" ne s’appliquent pas à leur cas ? Si on retrouvait un groupe d’extraterrestres dans leur vaisseau accidenté sur terre, est-ce qu’on pourrait les vendre, les utiliser comme esclaves, les manger, faire des jouets avec leurs dents, du cuir avec leur peau ? Les mettre en cage pour les exposer vivants ? Est-ce qu’on pourrait faire ça en se disant que les droits de l’homme ne s’appliquent pas aux non-humains ? Bien sûr que non, car les droits de l’homme sont les droits de la "personne" et notre conscience nous avertit qu’une personne non humaine a les mêmes droits qu’une personne humaine. Le fait d’avoir six yeux ou des tentacules à la place des bras n’y change rien. 

    Jusqu’à présent, on connaît peu de représentants de la conscience personnelle non humains. Et donc nous avons pris l’habitude de confondre le concept de notre espèce (l’humanité) avec le concept de ce qui la singularise spirituellement : être une personne consciente d’elle-même. Il est vrai aussi que nous respectons en toute forme humaine la promesse d’une conscience personnelle. C’est là une attitude un peu religieuse, "humaniste", pas forcément malsaine, et cela explique pourquoi nous respectons le corps des bébés humains davantage que celui des bébés mouches (par exemple). 

    Mais la question de la relativisation de la personne pose un immense problème. Est-ce qu’un bonobo est une personne ? Est-ce qu’il y a des degrés dans la conscience personnelle ? Comment les évaluer ? La valeur d’une personne est-elle quantifiable ? Par qui ?

    • Lucadeparis Lucadeparis 24 juillet 2011 13:47

      Je suis en accord avec ce que vous écrivez ici, et qui est antispéciste.
      L’unique point où je serais dubitatif est qu’"on connaît peu de représentants de la conscience personnelle non humains". Je ne sais pas ce que vous appelez peu et la connaissance éthologique et archéologique (depuis Kant, la "déclaration des droits de l’homme") est exponentielle et fait sauter les limites spécistes.


    • Qaspard Delanuit Gaspard Delanuit 24 juillet 2011 19:11

      Ce qui est délicat, c’est de poser un absolu, en disant que "seuls les hommes" ou que "tous les animaux" ou "toutes les formes de vie" ont une conscience personnelle. Je n’ai pas d’idée arrêtée à ce sujet. Je ne pense pas que toutes les formes de vie manifestent au même degré une capacité d’autodétermination fondée sur une conscience personnelle. Evidemment, c’est une impression et je ne peux pas le prouver. Mais ça signifie concrètement que je ne me comporte pas avec les insectes comme avec un être capable de m’exprimer son intention et de dialoguer avec moi. Dans la pratique, je dois bien essayer de définir ceux avec qui il est possible de construire une entente politique. Jusqu’à présent, la plupart des êtres avec qui je peux avoir ce genre d’échange sont des êtres humains ( mais pas tous non plus ! )


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