Tchakpoum 2 mars 2020 10:40

@maQiavel
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J’avais commencé à chercher les occurrences : il n’y a pas de "bon sauvage" dans le discours.

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Mais :
homme naturel : 5 fois
état primitif : 10 fois
homme sauvage : 22 fois
J’ai commencé à me sentir le Denis Robert devant son Chouard : "J’ai l’impression d’être un procureur, ce n’est pas le but"...
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Alors j’ai lu le discours.

Sa démarche est bien de reconstituer la vie de l’homme avant sa vie en société. Avec les connaissances que l’on a maintenant, le tableau qu’il dépeint, remonte à loin, avant la domestication du feu, sans habitat, à l’Erectus. Il entame son discours d’ailleurs avec la comparaison entre la condition de l’homme et celle de l’animal.
L’époque de Rousseau était à la recherche de ce que pouvait-être le droit naturel, afin d’envisager une société post-monarchique, sans castes, évitant un retour des guerres de religions.
L’exercice radical qu’il propose d’expurger la condition humaine de son conditionnement social est intéressant : il met à jour notamment les sentiments et passions qui nous encombrent et le système oppresseur du pouvoir politique qui n’a pas lieu d’être lorsque les hommes sont libres et autonomes.
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C’est un discours dense et je n’ai pas le recul pour réagir à ce texte que je viens de lire sans réduire son intérêt. Pour le moins, il soulève toutes sortes de débats. Notamment de réenvisager complètement la formation de l’homme (qui préfigure son Emile) et de la société (son Contrat Social). Et la portée de ses travaux est incontestable en éducation (Johann Heinrich Pestalozzi, Marie-Pape Carpentier, Pauline Kergomard, Maria Montessori...), comme en politique (les courants socialistes, la notion de souveraineté populaire. Et pas que, j’ai noté son intérêt pour Sparte...).

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Mais c’est aussi un travail artificiel qui pose l’idée que les hommes de jadis vivaient paisibles, sans anxiété, ce qui reste contestable (j’avais écrit que c’est plus compliqué que ça, et toutes les peuplades primitives, même à l’époque de Rousseau avaient déjà des organisation sociétales), contrairement aux hommes des sociétés européennes de Rousseau qui eux, vivent mal.

La réponse de Voltaire est recevable, au delà de son ironie : Vous plairez aux hommes, à qui vous dites leurs vérités, mais vous ne les corri­gerez pas. On ne peut peindre avec des couleurs plus fortes les horreurs de la société humaine, dont notre ignorance et notre faiblesse se promettent tant de consolations. On n’a jamais employé tant d’esprit à vouloir nous rendre bêtes ; il prend envie de marcher à quatre pattes, quand on lit votre ouvrage.
Rousseau se laisse emporter d’ailleurs par son propre mouvement. Dans la réponse à Charles Bonnet (M. Philopolis), il écrit :
Si la nature nous a destinés à être saints, me faites-vous dire, j’ose presque assurer que l’état de réflexion est un état con­tre nature et que l’homme qui médite est un animal dépravé.

D’autres, après lui, se sont laissés aussi emportés par ce genre de simplification.


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