maQiavel maQiavel 16 novembre 2014 14:26

-Sur Mai 68

Vous savez, je pense exactement ce que vous avez écrit plus haut , sur certains points , je ne vous trouve pas aveugle mais borgne.

C’ est à dire que vous vous focalisez sur certains points et ne poussez pas l’an alyse plus loin pour essayer de percevoir les choses de façons globales.

Par exemple vous écrivez « Prenez Mai 68 : voilà typiquement LA lutte sociale dont l’un des principaux mots d’ordre était "plus d’égalité !" 

De là, vous vous construisez une vision, selon moi erronée, selon laquelle Mai 68 s’est faites pour et au nom de l’égalité et que toutes les volontés allaient dans ce sens.

Personnellement pour aborder un mouvement politique, je me pose trois questions : quelle est sa prétention ? Quelles sont ses intentions ? Quelle est sa réalité ? Concernant Mai 68 :

-Sa prétention : elle est globalement ce que vous dites, ce mouvement s’est fait au nom de l’égalité. Mais il ne faut pas s’arrêter là.

-Ses intentions : Je vais me focaliser sur le Mai 68 étudiant càd le culturel et non sur le mai 68 ouvrier qui avait des revendications sociales.

Il y’a évidemment des gens, qui ont fait partie de ce mouvement pour qui la prétention se confondait avec les intentions, c’est sans doute la très grande majorité des participants. Mais pour analyser un mouvement, ce n’est pas sur la majorité qu’il faut se focaliser mais sur les minorités actives qui incarnent véritablement la force de ce mouvement.

Et pour cela, il faut se rappeler que ce mouvement était une émanation de ce que l’on a appelé la nouvelle gauche américaine. Pour cette nouvelle gauche, le développement harmonieux de l’individu était la condition ciné qua non de la transformation sociale tant voulue mais il fallait passer par la destruction des structures traditionnelles considérées comme hiérarchiques et oppressives. Mais on ne détruit pas des structures pour ne rien laisser pousser derrière, il fallait donc les remplacer par de nouvelles structures et par une nouvelle hiérarchie, des élites et des valeurs.

Quelles sont donc les intentions réelles de ce mouvement culturel : de prendre la pl ace des élites culturelles en place, en d’autres termes de devenir le conseiller du calife à la place du conseiller du calife qui occupait alors la place.

Cela relativise déjà l’importance qu’il faut donner à tous les jolis discours sur l’égalité puisque le but réel est de mettre en place de nouvelles hiérarchies.

-Sa réalité : ce mouvement correspond chronologiquement au ralentissement économique qui annonçait la crise des années 70 et la baisse de la consommation.

Le capitalisme occidental s’appuyait jusque là sur une éthique protestante, de l’épargne et du sacrifice pour l’avenir, des valeurs qui devenaient un frein à la rentabilité du capital dans une économie de plus en plus saturée.

Ce mouvement s’inscrit donc la nécessaire ouverture des marchés : l’exaltation permanente des désirs prônés par ce mouvement correspond à la naissance du capitalisme de séduction : le gaspillage est devenu une vertu, on n’est plus fier de ce que l’on produit, mais de ce que l’on détruit par la consommation. Le soi disant rebelle à l’ordre est en réalité celui qui en devient la clef de voûte : le jouisseur.

Quant à l’éducation Christopher Lash et Michéa ont décrit de phénomène de long en large : pour créer l’homo œconomicus que postule et veut la théorie, il faut que l’école cesse de transmettre des principes théoriques et moraux archaïques, qu’elle en finisse avec la culture classique et les humanités.

Le Mai 68 culturel offre au système capitaliste l’élément anthropologique qui lui manquait en instituant le règne du consommateur, porté par la seule immédiateté de ses désirs : enseigner l’ignorance pour que   les crétins consomment les objets en trop, les objets en trop permettent de faire tenir les crétins tranquilles. 

Donc, je pense que s’arrêter à la prétention du discours idéologique égalitariste de Mai 68 n’est pas pertinent, puisque même dans les faits, il n’a fait que les accentuer.

Et lorsque vous me demandez « Est-ce que nos élites, politiques ou intellectuelles, ne voulaient pas sincèrement bien faire ? », je vous répond que tout le monde veut toujours bien faire … pour satisfaire ses intérêts (je mets de coté la masse de naïfs qui ne sert de toute façon que de piétaille).


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