lundi 20 octobre 2014 - par Éric Guéguen

Figures de Socrate

L'émission proposée s'emploie à resituer les conditions de la condamnation de Socrate, la manière dont ses ennemis l'ont perçu, celle dont ses disciples l'ont défendu, le regard, également, que le peuple lui-même portait sur sa personne. Sont ici confirmées et la pluralité des figures de Socrate selon les auteurs (Xénophon, Platon, Polycrate et Aristophane en priorité), et le dissensus historique entre la philosophie naissante et la démocratie chancelante. Clair et passionnant.

 

 

Texte issu du site de l’émission Concordance des temps :

 

Il est loisible d’affirmer sans grand risque que le procès de Socrate, à Athènes, en 399 avant Jésus Christ, procès qui aboutit à sa condamnation à mort, est le plus célèbre de l’Histoire. Chacun se souvient que Socrate fut conduit, refusant d’échapper à sa prison, à ingérer la cigüe, poison mortel. Le jury de 500 citoyens tirés au sort qui prononça cette sentence à une importante majorité le fit à partir de trois chefs d’accusation : le mépris des dieux de la cité, l’introduction de divinités nouvelles et la corruption de la jeunesse. Or, si le livre récent de mon invité, Paulin Ismard, maître de conférences à l’université de Paris I Sorbonne, livre consacré à ce sujet, est tellement passionnant, c’est qu’il démontre avec perspicacité et subtilité combien cet « événement Socrate » – c’est son titre – est difficile d’interprétation, malgré la richesse des sources et en dépit des simplifications de nos manuels. C’est l’effet de la complexité des motifs qui conduisirent au verdict fatal et que nous allons tâcher de démêler ce matin. Et c’est aussi la cause de la puissante diversité des interprétations, qui en ont été produites, depuis plus de deux millénaires. Peu de postérités, en vérité, d’illustres personnages offrent des exemples plus probants d’une sorte de « discordance des temps ». Ce qui n’empêche nullement, on peut dire au contraire, de trouver dans cette histoire profonde et tragique de belles occasions de s’interroger sur la fécondité de son actualité. Jean-Noël Jeanneney

 

Programmation sonore :

- Extrait des Nuées d’ARISTOPHANE, adaptation radiophonique de Bernard ZIMMER, diffusée sur la radio nationale le 3 novembre 1954.

- Interview de Jean-Pierre VERNANT, par Michel DÉON, sur France Culture le 29 septembre 1968.

- Extrait de l’Apologie de Socrate de PLATON, lu par Georges CLAISSE dans Les nouveaux chemins de la connaissance de Raphaël ENTHOVEN sur France culture, le 12 mars 2010.

- Interview de Georges KIEJMAN, dans le cadre de l’émission Une vie, une œuvre de Jean DAIVE, diffusée sur France culture le 26 novembre 1987.

- Extrait d’un entretien avec Maurice MERLEAU-PONTY, par Georges CHARBONNIER, le 26 juin 1959.

 

Bibliographie :

- Paulin ISMARD,  L’événement Socrate, Flammarion, 2013.

- Claude MOSSÉ, Le procès de Socrate, Editions Complexe, 1987 (rééd. chez André Versaille Editeur en 2012).

- Louis-André DORION, Socrate, PUF, coll. QSJ, 2004.

 

Invité(s) :
Paulin Ismard, historien, spécialiste d’histoire de la Grèce ancienne, maître de conférences à l’université Paris 1 Panthéon Sorbonne

 

[[Actualité de Socrate]->http://www.franceculture.fr/emissio...]

 



16 réactions


  • gerfaut 20 octobre 2014 14:59

    Gnothi seautov


  • erQar erQar 20 octobre 2014 15:35

    Bonjour Eric,
    -
    Une question me chiffonne pourquoi nommer aristote et non pas par son vrai nom aristoteles
    -
    Je crois que si je fais référence à vous avec disant eric gueg...il semblerait que vous trouveriez cela très inconvenant.


    • erQar erQar 20 octobre 2014 15:40

      Pardon, il s’agit de socratès dans cette article


    • Éric Guéguen Éric Guéguen 20 octobre 2014 15:52

      Bonjour erQar.
       
      Et pourquoi les Américains (qui eux prononcent bien "Aristoteles") disent "Plato" en amputant le philosophe de la dernière lettre de son nom grec ? smiley
      Non, langue au chat, je n’ai pas la réponse sémantique sous la main, mais une logique nous échappe certainement, je ne pense pas que ce soit le fait du hasard ou d’un caprice quelconque.

      Je vais chercher tiens, merci...


    • Qaspard Delanuit Qaspard Delanuit 20 octobre 2014 22:26

      A l’époque de la sortie du film Platoon, (prononcez "Platoune"), une amie payée pour faire semblant d’enseigner la philosophie dans un lycée de la région parisienne se désespérait du fait que ses élèves confondaient pour la moitié d’entre eux le nom du fondateur de l’Académie avec le titre du film, aussi bien à l’oral ("Platoune a dit que...") qu’à l’écrit ("Platoon est un phylosofe athée-nien qui en saignait dans un gymnase").


    • Éric Guéguen Éric Guéguen 20 octobre 2014 22:42

      Cela remonte à 30 ans ou presque, Gaspard. Vous étiez déjà en âge de comprendre ces potacheries ?


    • Qaspard Delanuit Qaspard Delanuit 20 octobre 2014 22:57

      Oui, j’ai toujours été un vieux sage précoce. 


    • Éric Guéguen Éric Guéguen 20 octobre 2014 23:06

      Je cherche, je cherche, mais... Non. Ce n’est pas une contrepèterie. Tant pis.


    • Qaspard Delanuit Qaspard Delanuit 21 octobre 2014 19:36

      Non en effet, il n’y en a pas. Et j’en suis rassuré. Je me dis que je ne suis tout de même pas assez vieux pour contrepéter sans m’en rendre compte ! 


  • Le Moissonneur des Lilas (Under control, target eliminated) Le Moissonneur des Lilas 20 octobre 2014 16:24

    Quel intérêt de mettre un article sur un mec dont le seul haut fait est de se pavanner à St Tropez ? . ça me titillait smiley


  • gerfaut 20 octobre 2014 16:30
    Il y a plusieurs Socrate...

    Le problème de l’ Histoire est que l’ on voit toujours les choses à travers le prisme déformant de sa propre subjectivité. Sans parler de celle des autres, comme le prisme des témoins qui ont écrit sur le sujet qui nous interesse. Et même nous nous ne témoignerons pas la même chose selon le moment où on le fait. Ainsi, tenter de raconter vraiment la vérité semble impossible. En un instant il se passe tellement de chose inracontables. Raymond Queneau dans Exercice de style, raconte la même scène dans un bus de cent façons différentes, en changeant simplement de style, alors si on change les faits...

    C’ est une des raisons qui m’ a fait abandonner cette discipline, pour préférer la fiction. Là au moins, c’ est clair d’ entrée et plus honnète, ce que l’ on raconte cela n’ a jamais existé, et c’ est de nôtre subjectivité dont on parle. Un autre avantage est que l’ on devient Dieu, on crée les personnages, les tenants et aboutissants, toute la trame.

    Tout raisonnement ayant ses limites, il faut y réfléchir, pour renforcer ce raisonnement et le tester. On peut quand même faire un tri entre le vrai et le faux. Certes le prisme d’ un témoin d’ une scène historique, de la vie d’ un grand personnage a plus de valeur que ce que peut dire quelqu’ un un siècle plus tard. Il n’ y a donc plus, à part des faits précis et incontestables que des interprêtations à confronter. Des thèses qui s’ affrontent. 

    Cela ne signifie pas que le n’ importe quoi équivaut la thèse qui est la plus partagée par les spécialistes. On part non plus du vrai pour aller au vrai, mais on part de thèses pour aller au plus vraisemblable (jusqu’ à nouvelle information qui pourrait tout remettre en cause). L’ Histoire mêne donc à une certaine prudence, et même à une certaine sagesse.

    • Éric Guéguen Éric Guéguen 20 octobre 2014 16:44

      Merci pour ce commentaire.
      Le problème que j’ai avec ce que vous dites, c’est que vous semblez dire en conclusion quelque chose qui va à l’encontre de votre entrée en matière. Mais sûrement ai-je mal compris. D’un côté vous semblez dire que toute Histoire est vaine, de l’autre qu’elle conduit à la prudence, voire à une forme de sagesse.
      J’opte pour le second tableau, bien entendu. Je ne nie pas le rôle de la fiction, mais la politique a besoin d’exemples concrets, et à cet égard, Le procès de Socrate me paraît être source d’une critique du régime démocratique, contribuant par là même à son amendement par ce qu’il met au jour, à savoir le panurgisme qu’engendre le règne de l’opinion. L’obscurantisme n’est pas l’apanage des oligarchies ou des tyrannies.


    • gerfaut 20 octobre 2014 16:58

      L’ Histoire mène à une sorte de sagesse par le vide... On connait souvent les faits importants, on sait que Socrate a été jugé et condamné, mais pour le reste on ignore tout et on interprête les choses dans tous les sens jusqu’ à créer plusieurs Socrates.


      Il y a quelques années Jacques Le Goff avait parlé de ces thèses différentes qui s’ affrontent sans que l’ on puisse trancher, à cause des sources, et concernant Saint Louis il était même allé jusqu’ à en conclure, par provocation "Saint Louis a-t-il existé ?"

      Avec le peu que l’ on sait on peut quand même réfléchir, et comparer les situations.. L’ apport de l’ Histoire est très interessant, j’ en parle souvent d’ ailleurs.

    • gerfaut 20 octobre 2014 17:01

      Quand j’ ai préparé l’ agreg, on avait une question énorme sur 2 siècles et sur quasiment toute l’ Europe, mais sur l’ Allemagne on n’ avait que quelques exemples précis et puis c’ était tout. Sur tout un pays et deux siècles... Vraiment vu l’ état de nos connaissances, ça calme...


    • Éric Guéguen Éric Guéguen 20 octobre 2014 17:04

      En ce qui me concerne, je serais tout à fait prêt à poser la question : "Socrate a-t-il réellement existé ?" smiley
      En tout cas, l’idée d’une partition entre un gentil Socrate démocrate et un méchant Socrate instrumentalisé par Platon me semble d’autant plus creuse après avoir écouté cette émission. Comment savoir que Platon a trahi son maître si tout ce que nous savons de ce dernier provient en majorité de Platon lui-même ?...


    • Haze Haze 20 octobre 2014 17:06

      Sans parler de la fiabilité des sources contemporaines, qui pouvaient tout à fait mentir.


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