lundi 13 janvier 2020 - par TotoRhino

Radars : Bienvenue à “Atosland”

Vous ne croiserez plus les radars comme avant...

La machine à cash de l’état et de sociétés privées…

Après un an d'enquête, les journalistes d'ExtraMuros et de Reflets.Info révélent comment des entreprises privées, et tout particulièrement la société Atos, ont fait main basse sur les juteux marchés publics des radars et comment elles ont surfacturé de nombreuses prestations. Tout cela avec la complicité passive de l'Etat.

Vous découvrirez que les règles qui régissent les marchés publics n'ont pas été respectées (étonnamment ?), mais surtout que ce non-respect a été prémédité et organisé. Vous découvrirez aussi comment des journalistes d'investigation peuvent ramer pour obtenir des informations, surtout quand il s’agit de les obtenir de notre système étatique ; un an d’enquête…

Bienvenue à Atosland

Atos est une SS2I, une société de services et d'ingénierie en informatique donc. Cependant, l’état français va lui donner l’entière gestion de “l’usine à PV de Rennes” et lui faire contracter ainsi pour 1 milliards d'euros de marchés entre 2003 et 2013. Des marchés aussi divers que la cantine, la sécurité, le ménage, la décoration florale, bref, des marchés qui sortent des compétences de cette entreprise.

Donc, depuis 2003 cette société engrange les contrats liés de près ou de loin à la gestion des PV. Quant à ces derniers, on parle ici de l’ensemble des PV émis sur le territoire, qu’ils soient issus d’un enregistrement automatisé ou réalisés par le gardien de la paix lambda.

Cette situation de monopole durant plus de 10 ans, lui a permis d’imposer ses tarifs qui n'ont jamais été contestés par l'État. Au point même que les prévisions des dépenses discutées lors des comités de direction de cette société n’avaient plus rien à voir avec la réalité : lorsque 3 à 4 millions avaient été actés comme nécessaires, Atos en demandait 11 à l'état.

Atos était en fait devenue le décisionnaire, elle avait pris le pouvoir.

Le rapport de l’organe de contrôle du ministère de l’intérieur sonne la fin de la récré

En 2014, soit plus de 10 ans après, un rapport de l’IGA finit par dénoncer ce marché unique et la position dominante d’Atos qui en découle. Il précise notamment que passer plusieurs marchés spécifiques avec des entreprises spécialisées aurait été plus économique.

L’Inspection Général de l’Administration, qui émet normalement des rapports publics, c’est à dire consultables par tous, a vu son enquête soigneusement gardée au secret par le ministère intéressé.

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Elle dénonce par ailleurs des pratiques rendant impossible la libre concurrence (pour les libéraux de l’époque, ça la fout mal) :

  • Des délais intenables pour un nouvel entrant,
  • Atos profite d'une rente de situation pour pratiquer des prix élevés,
  • mise en concurrence biaisée,
  • intérêts financiers de l'administration guère préservés.

Ce que dit en fait ce rapport, c’est qu’un marché unique ne s'imposait pas et aurait coûté moins cher à l’administration et donc, à nos impôts.

Atos étant une société limitée à des activités informatiques, elle a donc dû faire appel à au moins 25 sous-traitants (chiffre 2014, le seul connu à ce jour), en n’oubliant pas de se faire… de confortables marges, marges pouvant aller jusqu'à 22 %. Qui payait l’addition ? Le contribuable !

L’heure de la scission

Ce rapport, bien qu’ayant mué "Confidentiel", était devenu une patate chaude et l'État finit ainsi par scinder "le marché du PV" en quatre branches : Informatique, Editique, Restauration et sécurité.

A l’annonce de la scission, Atos voulant conserver une part de cette fructueuse rente, s’est portée candidate pour la partie informatique ; la seule partie dans laquelle elle avait de réelles compétences et en fait la seule partie pour laquelle un contrat aurait été légitime. Elle a ainsi proposé une facture de 60 millions d'euros l’an, quand la concurrence en proposait 20, soit trois fois plus. C’est ainsi la société CAPGEMINI, auteure de la proposition moindre, qui a remporté le marché de la branche informatique.

Au final, alors que l’état se voyait facturer des dépenses globales de 400 millions d'euros par Atos lors de son monopole, celles-ci ont été ramenées à 144 millions après scission, soit une baisse d'environ 65 %. Ce chiffre de 400 millions n’est pourtant qu'une estimation, l'État français faisant blocage pour communiquer les avenants aux marchés qu’il aurait passés avec la société Atos. On peut donc imaginer un montant orienté à la hausse.

Le PV électronique pour qui ?

La mise en place du PV électroniques a été justifiée pour apporter plus de sécurité routière et faire baisser les morts sur nos routes. On ne peut qu’acquiescer de si bonnes intentions, et on pourrait fort légitimement penser que les auteurs qui auraient intérêts à faire une telle demande sont, le ministère de l'Intérieur, ou celui des transports ? Mais non ! C’est curieusement celui du ministère des Finances qui en est l’auteur, à croire qu’il avait visiblement plus de bénéfices à tirer de cette affaire...

Vous avez dit conflits ?

Avant cette scission, qui était le ministre des Finances ? En 2006, Thierry Breton (Vous savez celui qui a été pantouflé à la commission européenne après l’échec de Sylvie Goulard) ! Mais en 2007, il quitte ses fonctions pour devenir dès 2008, devinez quoi : le PDG de la société Atos (En savoir plus sur Atos et Thierry Breton).

Et en 2007, sous la direction de l’ancien ministre donc, le contrat signé avec la société Atos, est passé étonnamment de 236 millions d’euros à 333 millions, soit 40 % d'augmentation.

Plusieurs ministres, ou hommes d’état, ont ainsi quitté leur vie de fonctionnaire pour aller rejoindre ces sociétés qui facturent, ou ont facturé, grassement l'État au titre de la privatisation des PV. C’est ce qu’on appelle plus vulgairement du pantouflage d'État.

L'association Anticor a porté plainte… il y a quatre ans.

Pour en savoir plus sur ce documentaire et ses auteurs, les journalistes d'ExtraMuros et de Reflets.Info, je vous conseille l’excellent interview de Thinkerview.



7 réactions


  • vesjem vesjem 13 janvier 2020 13:35

    le problème n’est pas atos ; car on sait que la corruption existe dans la passation des marchés d’état (souvent octroyés à des amis : autoroutes ...)

    le problème c’est la surveillance globale de l’individu qui tend à se généraliser ; ceci poursuit 2 objectifs

    —>humilier et asservir le citoyen

    —>faire du pognon pour rémunérer toute cette bande de passifs bons à rien


    • TotoRhino TotoRhino 13 janvier 2020 15:30

      @vesjem

      « … on sait que la corruption existe dans la passation des marchés d’état… »

      C’est justement parce que l’on sait que la passation des marchés publics est souvent à l’origine de magouilles, que l’on doit rester vigilant ! Et lorsque que l’on prend des personnes les doigts dans le pot de confiture, il faut le crier haut et fort. Atos est un justement un cas d’école dans le genre. J’en profite pour saluer le travail de ces journalistes indépendants, d’avoir fait ce boulot remarquable.

      Concernant « la surveillance globale de l’individu », je te rejoins tout-à-fait. J’ai d’ailleurs fait un article sur le sujet récemment, mais je trouve qu’il n’a pas eu un écho à la hauteur de l’enjeu pour la liberté du citoyen : https://www.agoravox.tv/actualites/citoyennete/article/la-surveillance-de-masse-en-marche-83593


  • vesjem vesjem 13 janvier 2020 21:27

    beaucoup de gens ne se posent pas de question ; ils vivotent et se font balloter à droite, à gauche, au milieu, enrobés par un discours journalitique sirupeux aux ordres

    c’est quand ils ont un doigt dans le cul, qu’ils se disent : "ha, bien, merde alors...", et encore tout juste s’ils se rendent compte de la longueur du doigt

    les guignols aux manettes, qui ont, depuis longtemps des coui...es aux cul mais pas les leurs, ont maintenant un train de vie (de château, souvent), qui les dispense d’être patriotes


    • yoananda2 13 janvier 2020 21:32

      @vesjem
      bien dit !


    • Le Monde part en couilles Vraidrapo 14 janvier 2020 08:49

      @vesjem
      ils vivotent et se font balloter à droite, à gauche, au milieu, enrobés par un discours journalistique sirupeux aux ordres

      Vous avez mis le doigt au fond !

      PS : France-Intox annonce ce matin un record d’audience 6,6 millions de couillons (et beaucoup de critiques avisés, j’espère) une hausse de 500 mille, paraît-il ?


  • TotoRhino TotoRhino 22 janvier 2020 12:44

    Gilles Grapinet, ancien directeur de cabinet de Thierry Breton à Bercy, estime que la plainte contre X d’Anticor est d’un « vide sidéral ».

    C’est en tout cas ce que titre le journal Le Point dans son article, ce même journal qui a dit que le défunt Cédric Chouviat roulait sans permis, alors qu’il se déplaçait avec un scooter de 50cc, véhicule qui se conduit justement... sans permis !


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