Diffamation : vers une loi plus dure pour les médias sur Internet ?
Passée quasi inaperçue, une proposition de loi projette de liquider la loi de 1881 sur la presse, en allongeant le délai de diffamation sur Internet. Ce délai était traditionnellement de trois mois dans la presse classique. Sur Internet, il passerait à un an.
Mais le plus grave est que, le 4 novembre dernier, les sénateurs ont fait le distingo entre les sites issus de médias traditionnels "régulièrement déclarés ou autorisés", et les autres. Les premiers, jugés prudents par la Garde des sceaux Rachida Dati, resteraient soumis au régime actuel. Les autres, comme AgoraVox, Mediapart, Bakchich ou Rue 89, mais encore l’ensemble des blogs, passeraient sous le nouveau régime, autrement plus strict.
Une diffamation sur le site du Monde resterait ainsi à 3 mois, tandis qu’une diffamation sur AgoraVox, par exemple, serait étendue à 12 mois...
Les arguments employés pour étendre le délai de diffamation sur Internet tiennent difficilement la route. En effet, s’il est vrai qu’un article reste plus visible sur Internet que sur le papier, il est aussi vrai qu’une diffamation se détecte beaucoup plus vite sur Internet que sur le papier. Il suffit de faire un minimum de veille sur son nom ou de paramétrer des alertes Google. Repérer une diffamation qu’on aurait subi dans un journal régional constitue une autre paire de manches...
On peut espérer que le Conseil constitutionnel aura la sagesse de refuser ce projet de loi qui créerait une différence tout à fait injuste entre médias traditionnels et médias 100% web.