Russie : les saisons de la datcha
Avec l’arrivée des beaux jours, sortir de Moscou en voiture le vendredi soir devient difficile car dès 16 heures, les automobiles et leurs occupants - familles, chiens, sacs de victuailles, bric-à-brac - sont à touche-touche sur les artères qui mènent hors de la métropole. On pourrait croire à un exode de masse mais il n’en est rien, en fait chaque vendredi, de Moscou à Vladivostok, les Russes n’ont qu’une idée en tête : tous à la datcha !
La datcha est un lieu où s’exprime toute l’âme de la Russie :
C’est une maison de bois, en dehors de la ville, avec son lopin de terre où les russes viennent en famille pour se reposer et/ou cultiver son jardin.
Mais la datcha est bien plus qu’une simple maison secondaire. Elle est un mode de vie, un rituel incontournable de la société russe évoqué par les grands écrivains, un élément essentiel de la vie des russes, un endroit dans lequel ils se ressourcent en famille, loin de la ville et près de la nature.
A la veille du rude hiver, on y prépare diverses conserves issues des produits du jardin, des bocaux de tomates et de cornichons, des confitures de framboises et de fraises, des jarres de fruits au sirop qui sont ensuite apportées à la ville. Et quand les pénuries alimentaires se firent sentir comme dans les années 1990, les produits cultivés à la datcha adoucirent le sort de millions de Russes.
De même qu’à l’époque soviétique, la datcha servit de lieu d’exil et de refuge. En 1969, c’est à la datcha du violoncelliste Mstislav Rostropovitch qu’Alexandre Soljenitsyne, l’écrivain du goulag honni par le pouvoir soviétique, se réfugiera. Les dissidents aimaient aller à la datcha, où ils pouvaient cacher leurs samizdats (publications clandestines), écouter les radios interdites et se laisser aller à des discussions politiques.