mardi 16 avril 2013 - par
Expulsions en Espagne : la bataille gagnante de Mohamed Aziz
Perdre sa maison et continuer à payer sa dette à la banque. C’est la cruelle expérience que vivent des milliers de personnes en Espagne. Et c’est ce qui est arrivé au protagoniste de l’histoire que nous allons vous racontez dans ce News+. Mais lui, il ne s’est pas résigné, il a dénoncé sa banque et son cas est arrivé jusqu’à la justice européenne. Je vous propose de regarder notre reportage et ensuite, nous parlons avec un juge.
Mohamed Aziz a subi le même sort que des milliers d’autres personnes en Espagne. Il a perdu son emploi de soudeur en 2009 et ensuite son logement, qu’il avait acheté à Martorell, près de Barcelone, grâce à un prêt de 126 mille euros en 2003. En 2011, la Caisse d’Epargne, à laquelle Mohamed Aziz doit 115 mille euros entame une procédure d’expulsion car il est en retard sur 4 échéances de 700 euros chacune. Depuis, il habite avec sa femme et ses trois enfants dans ce logement social dont le loyer est de 270 euros.
« Lorsque j’ai eu ce probleme j’en ai parlé au père de Dionisio, qui est décédé maintenant, il en a parlé à son fils et c’est lui qui m’ a contacté et a commencé à réfléchir aux solutions pour en arriver jusqu’à maintenant » explique-t-il.
Car Mohamed ne s’est pas résigné à son sort, c’est lui qui à l’origine de l’arrêt de la Cour Européenne de Justice qui a mis hors jeux la loi espagnole sur les expulsions et permis aux juges de la suspendre préventivement. Et Dionisio Moreno, modeste avocat toujours prêt à défendre les plus démunis, va l’aider à mener ce combat.
« Mohamed est venu avec un ami, lui aussi Marocain, un certain Javi, et il m’a expliqué qu’il avait un problème, qu’il était en retard avec ses échéances raconte le jeune avocat. Nous avons essayé de négocier avec sa banque, la banque n’a rien voulu savoir, et nous a acculé à une procédure d’expulsion. »
Mais Dionisio Moreno va assigner à son tour la banque devant le Tribunal de commerce pour clause abusive dans le contrat de son client. Il raconte sa discussion avec le banquier :
« Lorsque nous sommes entrés au tribunal de commerce, le banquier m’a dit : : « Ah, vous êtes venus ? Mais on lui a déjà pris la maison, à votre client ». Je lui ai répondu : « écoutez, il a un avocat tétu et ne va pas s’arrèter là ». Mais il m’a demandé : « qui paiera vos honoraires ? » Alors je lui ai rétorqué : « C’est mon père qui m’a mis sur dossier, qu’il repose en paix, et je ne lâcherai pas l’affaire. »
Tellement coriace, maître Moreno, que le juge a porté l’affaire devant la Cour Européenne du Luxembourg, laquelle déclarera la loi espagnole non conforme à la directive européenne de protection des consommateurs datant de 1993. Après une bataille de deux ans et demi, le verdict tombe le 13 mars dernier.
« Le problème, c’est qu’on était tellement émus qu’on n’arrivait pas à ouvrir le document avec l’arrêt de la CEJ, se souvient Dionisio Moreno. Finalement, on a pu l’ouvrir. Je suis allé directement au verdict… On avait gagné. »
Dionisio et Mohamed savent qu’ils n’ont gagné qu’une première bataille, mais ils ne s’arrêteront pas en chemin. La victoire, ce sera quand Mohamed récupérera son logement saisi par la banque.