Chute de la République romaine et déclin de l’Europe actuelle : de troublantes similitudes ?
Voici un podcast passionnant de l'émission Concordance des Temps, présentée tous les samedis matin par Jean-Noël Jeanneney.
Sujet du 21 septembre dernier : y a-t-il des traits communs à la chute de la Rome républicaine et à l'actuelle crise de l'Europe ? Pour en parler, il reçoit l'historien belge David Engels, à l'occasion de la sortie de son livre Le Déclin.
On est accoutumé à considérer que les historiens entrant dans la carrière consacrent leur jeune enthousiasme à des travaux approfondis sur des moments, des tensions, des intrigues spécifiques, et qu’ils attendent leur maturité pour aborder à l’audace des vastes synthèses et des survols comparatistes. Or voici que David Engels, professeur d’histoire romaine à l’Université libre de Bruxelles, qui n’a pour sa part que 34 ans d’âge, infirme vaillamment cette règle puisque sa juvénile audace n’a pas hésité à nous offrir une réflexion globale sur un rapprochement inédit à deux milles ans de distance, et il le fait avec un élan et une originalité de pensée qui m’a incité à le convier ce matin. La concordance des temps qu’il développe concerne l’Union européenne en crise. Il la rapproche, dans un livre intitulé significativement « le Déclin », avec celui de la République romaine tardive, épuisant son énergie au profit de l’émergence de l’Empire créé par Auguste et consolidé par ses successeurs. Dans les deux cas, David Engels discerne une crise identitaire qui lui semble de plus grande conséquence que les difficultés économiques et même les déséquilibres institutionnels. Et il va jusqu’à tirer les conséquences de ce parallèle pour se faire le prophète des temps à venir, en prévoyant, en espérant peut-être, une évolution de notre continent qui pourrait, selon lui, s’organiser comme Rome, dans les premiers siècles de notre ère, sous la forme de ce qu’il appelle une Europe impériale modérée. À le lire, on le suit par moment, on regimbe à d’autres, mais on reste toujours stimulé et j’espère que cela va donner quelque sel à notre conversation.
Jean-Noël Jeanneney