maQiavel maQiavel 21 septembre 2021 17:52

@yoananda2

C’est très intéressant parce que ton illustre à quel point les robinsonades ont de l’influence. Et tu es loin d’être le seul à penser comme ça, c’était aussi mon cas avant de m’intéresser à l’anthropologie et de déconstruire tous les présupposés qui m’étaient inculqués. Je ne vais même pas utiliser le contre argument selon lequel tu as utilisé des produits de la société matériels, de la main d’œuvre, de la monnaie etc pour construire ta maison même si effectivement il y’aurait beaucoup à dire là-dessus. 

Ton argument clé c’est : « si je n’étais pas là, cette maison n’existerait pas ». On va faire simple en posant cela pour vrai. Bien la maison est là et tu y loge. Enfin, juste nuit parce que dès le lendemain, je débarque avec mes hommes et je te vire. Tu te plains en disant que c’est à toi puisque tu l’as construite. Et moi de te répondre que la maison n’appartient pas à celui qui l’a construit mais à celui qui a la force de l’occuper. J’en ai la force, donc c’est à moi. Qu’est-ce que ça veut dire ? Que tu as construit une maison, que tu as habité dedans, qu’elle n’existerait pas sans toi mais qu’elle ne t’as jamais appartenue dans les faits. Pour qu’elle t’appartienne, il aurait fallu créer un truc qui s’appelle la propriété et qui te donne le droit de la posséder. Et il aurait fallu une force qui soit capable de te garantir ce droit et m’empêcher de venir m’en emparer. Et ça, c’est la collectivité qui te les donne, elle va créer une institution qui s’appelle la propriété pour que tu puisses jouir de ta maison de façon pérenne. C’est ça le sens de « la propriété est sociale dans ses origines », c’est la communauté politique qui crée la légitimité, la légalité, le contexte qui va enfin te permettre de dire avec assurance « c’est à moi ». Mais ce « c’est à moi » n’est jamais absolu, c’est sous certaines conditions et ça a des limites. Et ces limites, tu vas les accepter parce que sans la collectivité, tu ne possèderais rien.

Quand on s’intéresse à l’émergence du droit de propriété, on constate que c’est toujours un ensemble de mécanismes sociaux et d’institutions politiques qui vont la produire ( et c’est la même chose pour le marché d’ailleurs mais c’est un autre sujet) et qui interdisent de la penser comme quelque chose d’absolu dont on disposerait à sa convenance.

Une fois qu’on a posé le cadre, je peux répondre à ceci : « C’est la ou je ne vois pas ce que la dignité (les besoins physiologiques) des autres viennent intervenir DANS LA MESURE ou je ne demande pas une règle d’exception en ce qui me concerne, j’admets que les autres fasse pareil à mon sujet ».

Eh bien, dans cette logique là, ce que feront ceux qui ne sont pas en mesure de satisfaire leurs besoins physiologiques, c’est s’emparer de ton pain, pour pouvoir survivre. Et c’est normal parce que toi aussi tu ferais pareil, si tu as des enfants, tu comprendras facilement que tu feras tout pour ne pas les laisser pas crever de faim. Finalement, les besoins physiologiques des autres te regardent et le seul rempart entre eux et toi, c’est l’Etat, sa police, sa justice, cet Etat dont tu dis qu’il ne devrait pas se mêler de tes affaires qui, en passant, n’existeraient pas sans lui.

Le truc c’est que, comme nous sommes nés, avons grandi et acquis des biens dans un cadre stable, nous avons l’illusion que ce que notre propriété est réellement à nous mais c’est une fiction que l’Etat a crée pour que nous puissions en jouir en paix. Si l’Etat s’effondre, la fiction s’évapore, et on va se rendre compte que c’est la force qui permet de posséder un bien. Et comme on trouve toujours plus fort que soi, la possession n’est jamais durable …


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