Daruma 21 février 2020 20:30

C’est brouillon. Il n’a pas la pédagogie d’un Christophe Guilluy. Un grand absent : le fascisme en Ukraine. Le fait qu’il ne soit même pas cité dans la liste des régimes fascisants est révélateur. Bruno Palheta aurait pourtant, avec l’Ukraine, la possibilité unique d’étudier le fascisme in vivo. Il verrait notamment que le fascisme n’est pas nécessairement un phénomène de masse : il est minoritaire en Ukraine, ce qui ne l’a pas empêché de prendre le pouvoir, de s’y maintenir et d’imposer son idéologie. Il suffit d’un appui étranger. Il suffit de contrôler les postes stratégiques (police, services de renseignement, armée), d’avoir des milices et des bataillons punitifs qui terrorisent la population et même le gouvernement, d’avoir des militants fanatisés façon antifas pour empêcher les gens de s’exprimer, d’avoir un site internet (Mirotvorets) qui publie les coordonnées des « impurs » idéologiquement pour ceux qui voudraient aller les tuer. Petite parenthèse : je suis sûr que les antifas rêvent de faire la même chose. Il suffit d’un matraquage propagandiste qui lave les cerveaux et criminalise les opposants, qui criminalise la pensée tout court. Il suffit que les pays occidentaux et leurs médias ne s’y intéressent pas, feignent d’ignorer ce qui s’y passe, regardent ailleurs. Il suffit de rendre tout changement de politique impossible par la menace d’un putsh. Il suffit de soigner les apparences en organisant des élections qui ne servent à rien.

Tout ça pour dire que le fascisme rampant, qui garde l’apparence de la démocratie et qui s’installe progressivement par dérive autoritaire du pouvoir déjà en place est bien plus à craindre que le fascisme « folklorique », costumé et nostalgique d’un passé révolu tel qu’il existe en Ukraine et qui ne se maintient que parce qu’il est utile à l’État profond étasunien. Palheta parle, surtout vers la fin de l’entretien, du danger des politiques néolibérales à marche forcée. C’est bien, mais il ne voit le fascisme que comme un ennemi extérieur qui risque de prendre le pouvoir. Je pense que le fascisme, plutôt que par une prise du pouvoir, risque davantage d’émerger petit à petit de l’intérieur même du pouvoir, que ce soit par la manière forte et brutale, ou que ce soit de manière orwellienne.


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