Joe Chip Joe Chip 30 mai 2019 10:31

@maQiavel

Oui, les souverainistes ne semblent même pas se rendre compte qu’ils ont totalisé à peine 5% dans cette élection, et je parle là seulement des souverainistes de droite. Les souverainistes de gauche ont disparu politiquement ou ont été absorbés par le RN. En tant que tel le souverainisme n’a pas disparu mais il est fragmenté et ne permet plus de constituer une force politique majeure. En 20 ans on est passé de Séguin et Chevènement (qui auraient gagné s’ils avaient accepté de s’unir) à NDA, Philippot et dans une certaine mesure Asselineau, qui refusent toujours de s’unir malgré leurs scores faibles ou confidentiels et qui à moins de 5% sont désormais en situation de concurrence au sens darwinien du terme dans leur niche électorale. La chute est quand même sévère. 

Et ça n’explique pas effectivement l’effondrement de la FI malgré la purge qui leur a sans doute coûté 2 ou 3% d’électeurs. 

Pour moi il y a plusieurs facteurs :

 le premier, et peut-être le plus important, est la surperformance provisoire de l’élection de 2017 qui dépassait de loin l’étiage normal de la FI. Mélenchon a joui d’un alignement favorable des planètes lui permettant d’engranger les votes d’électeurs ne partageant pas du tout les mêmes idées (gauchistes/antiracistes, souverainistes, "laïcards" républicains, jeunes en quête du "supplément d’âme", bobos-écolo) 
 dès le lendemain de l’élection, le programme rassembleur écolo-industrialiste articulant écologie sereine et économie de la mer a été mis de côté au profit des bonnes vieilles logiques d’appareil ; les gauchistes, marginalisés ou tenus au silence durant la campagne, ont alors entrepris de purger le parti des socio-souverainistes et des "laïcards" de gauche 
— les coups de sang de Mélenchon et la révélation de ses penchants césaristes difficilement refoulés ont clairement eu un gros impact médiatique, en particulier sur les écolo-bobos impressionnables. Les propos maladroits sur le Vénézuela ont achevé de forger l’image d’un dictateur en puissance
— l’échec de la ligne néopopuliste et de la tentative d’OPA électoraliste sur les GJ qui n’a rien rapporté sur le plan électoral, et qui a déchainé en interne les gauchistes institutionnels comme Autain voyant dans les GJ un mouvement poujado-populiste et anti-européen et profitant de la débâcle pour exiger le retour clair à une ligne gauchiste traditionnelle excluant donc les socio-souverainistes et les anti-européens.

Je pense que la seule manière de rebondir , ce serait de revenir aux fondamentaux de 2017 , de changer de leader et de mener une institutionnalisation démocratique du mouvement avec des structures au fonctionnement clair et transparent. Mais bon , c’est peut-être déjà trop tard …

 

A mon avis c’est trop tard. Macron a réussi malgré tout son pari de vitrifier le paysage politique français qui ressemble maintenant à la surface d’une planète gelée. Les GJ auront finalement rendu un grand service à Macron en lui permettant d’agréger auuour de lui le parti de l’ordre et en discréditant durablement toutes les thématiques sociales désormais associés à des images de violence destructrices perçues comme des caprices catégoriels par une grande partie de la population. Le refus entêté de toute forme de politisation ou d’organisation aura entretenu le fantasme d’une armée de "résignés-réclamants" (Attali) voulant établir une sorte d’anarchie situationniste sans aucune perspective de résolution. 
Reste le RN comme opposition "cadrée" mais sans marge de progression politique. 

Pour moi le vrai clivage politique est maintenant entre les "inclus" de toute tendance et les exclus. Macron avec cette élection a renoncé à être Président pour devenir le représentant des inclus et de leurs intérêts, le garant de l’ordre aux yeux de tous ceux qui ont quelque chose à défendre dans la mondialisation et l’Europe face aux revendications  légitimes ou non  des hordes de mécontents et de desservis. A partir un socle d’adhésion politique réelle qui doit être de l’ordre de 10 à 15%, il parvient à un socle sociologique d’adhésion autour de 25%, voire 30% selon certaines projections pour la présidentielle. Le seul risque de cette stratégie de délégitimation systématique de toute forme d’opposition, c’est le risque insurrectionnel lié à la dépolitisation d’une partie croissante du corps social, mais ce dernier reste limité et sous-contrôle.

Malheureusement, il y a un déficit de lucidité politique chez ses opposants qui préfèrent voir le monde tel qu’ils voudraient le voir plutôt que tel qu’il est et qui se complaisent dans leur bulle cognitive et leur présupposé idéologique. Porter le frexit ou un discours anti-UE frontal dans le contexte actuel, c’est une tâche impossible. La bataille a été perdue, il faut changer de tactique. 

La logique voudrait qu’il y ait un grand rassemblent des forces à droite et à gauche (toute "union sacrée" étant impossible) mais c’est peu probable d’ici la prochaine présidentielle.    


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