maQiavel maQiavel 24 juin 2017 13:14

@wendigo

Avant de vous répondre, je tiens à préciser qu’en ce qui me concerne, c’est l’affaire Dieudonné qui a structuré ma représentation du principe de liberté d’expression. C’est juste pour que vous compensiez le cadre dans lequel se situent mes propos. Pour moi, c’est LE cas d’école. Depuis cette affaire, je suis pour un droit d’expression qui se limite uniquement à l’incitation à commettre une infraction et à la calomnie.

-Il y’a d’un coté le principe et de l’autre les individus. Les principes transcendent les individus. Cela signifie que quel que soit l’individu, le principe ne doit pas changer, ils ne doivent pas se modifier en fonction des individus, ils doivent être impersonnels. Cela signifie également que défendre le principe ne signifie pas défendre l’individu incriminé.

Je donne un exemple : la peine de mort. Un activiste peut être par principe contre la peine de mort. Ce n’est pas parce qu’il est par principe contre la peine de mort qu’il défend un meurtrier responsable de la mort d’enfants. C’est qu’il considère que quel que soit le crime commit, aucun individu ne devrait être condamné à mort. On peut ne pas être d’accord avec lui mais on ne peut pas l’accuser de défendre des meurtriers ou de soutenir les meurtriers, ce serait complètement idiot.

Pour la liberté d’expression, c’est pareil. Lorsque des personnes s’opposaient à la censure du spectacle « le mur », le premier réflexe était de les accuser de défendre Dieudonné et de partager ses thèses. Et pourtant, nombreux parmi ceux qui étaient contre cette censure détestaient Dieudonné, beaucoup ont du expliquer inlassablement qu’ils ne défendaient pas Dieudonné mais un principe général qui dépassait largement le cas d’un individu. Etre contre la censure d’un spectacle artistique quel qu’il soit au nom de la liberté d’expression, ce n’est pas défendre l’artiste, c’est défendre un principe général s’appliquant à tous les citoyens.

Pour les pétitions, c’est la même chose. En ce qui me concerne, j’aurais pu signer la pétition demandant la libération de Vincent Reynouard ( à l’époque je n’avais pas d’opinion aussi arrêtée sur la question mais l’affaire Dieudonné est passée par là). Pas parce que je défends Vincent Reynouard ou que je serais nazi dans mon fort intérieur, j’abhorre de tout mon être cette idéologie totalitaire faisant de la négation de l’individu une valeur. Mais je l’aurais signé par attachement au principe de liberté d’expression. Et cela ne m’aurait pas empêché d’entrer en politique, si j’en avais ressenti le devoir, bien au contraire, j’en aurais été fier !

Et bien pour cette pétition que la dame Obono a signé c’est pareil. Elle a dit ne pas cautionner ce rappeur mais qu’elle a signé cette pétition au nom de la protection des libertés fondamentales. Il faudrait vérifier la cohérence de ses propos mais c’est ce qu’elle a dit jusque là. Quand bien même ce rappeur a dit « nique la France », on s’en fiche, le principe de liberté d’expression dépasse sa petite personne. Et signer une telle pétition en défense de la liberté d’expression ne doit pas empêcher quiconque d’entrer en politique, bien au contraire puisque cette défense est en soi un combat politique.

Sinon sur les mœurs, Rousseau de son temps avait déjà émit un principe important :  « c’est à l’estime publique (comprendre opinion publique) à mettre la différence entre les méchants et les gens de bien. Le magistrat n’est juge que du droit rigoureux mais le peuple est le juge des mœurs ».

Ce qu’il voulait dire, c’est qu’on ne doit pas s’abstenir d’émettre des jugements de valeurs même pour des comportements légaux. Mais ce n’est pas parce qu’on juge qu’un comportement est « mauvais » qu’il faut l’interdire. On peut considérer que dire « nique la France » est mauvais et on a le droit de le clamer. Mais interdire ce comportement, c’est autre chose. 


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