Joe Chip Joe Chip 29 décembre 2014 00:17

J’ai écrit "me fait penser un peu au général Boulanger" pas "nouveau Boulanger". C’était un rapprochement, pas une analogie. Boulanger a fédéré provisoirement des aspirations contradictoires et parfois antagonistes. La droite réactionnaire voyait même en lui son champion qui allait renverser "la gueuse", comme on dit dans ces milieux-là. Boulanger savait également moduler ses discours en fonction de ses différents auditoires, une des caractéristiques principales du "soralisme". Il est souvent décrit comme un homme paradoxal. Et la fin du boulangisme rappelle un peu celle de la "dissidence", toute proportion gardée :

En tout cas, ses adversaires ont eu chaud. Pour eux, il est absolument hors de question de lui laisser une deuxième chance. Ils vont donc maintenant essayer de le discréditer par tous les moyens.
Le ministre de l’Intérieur, Ernest Constans, va tout mettre en œuvre pour l’inquiéter. Il fait feu de tout bois. Il poursuit en justice la Ligue des Patriotes, l’un des soutiens les plus actifs du général Boulanger. Puis il le menace carrément d’arrestation et l’informe qu’il va demander à la Chambre la levée de son immunité parlementaire. Boulanger s’enfuit à Bruxelles. Une nouvelle dérobade qui va achever de le discréditer auprès de ses partisans même les plus acharnés. Trop heureux de le voir s’exiler, Constans favorise sa fuite. Le 4 avril, la chambre vote la levée de son immunité parlementaire, et dès lors la chasse contre le général Boulanger est officiellement ouverte. Ses détracteurs se déchaînent. On le met aux abois. Il est bientôt poursuivi pour « complot contre la sûreté intérieure » mais aussi pour détournement de fonds publics, corruption et prévarication. Le Sénat réuni en Haute Cour de justice finit par le condamner par contumace à la « déportation dans une enceinte fortifiée ». Constans fait également interdire le cumul des candidatures. De fait, aux élections de septembre 1889, les boulangistes n’obtiennent plus que 44 élus contre 166 monarchistes et 366 républicains. En quelques mois, le boulangisme s’est complètement effondré. 

Le suicide du général marque la fin définitive d’une aventure politique, trop rapide, trop hasardeuse et trop flamboyante, portée par un homme dévoré par l’ambition mais qui n’avait finalement pas du tout la stature et la vision politique nécessaire pour la concrétiser.
Le mouvement politique du général Boulanger reste un épisode assez incroyable, typique d’une complexité politique à la française qui n’a jamais vraiment réussi à digérer ses paradoxes.

Clémenceau a eu ce mot définitif à son sujet : "il est mort comme il a vécu : en sous-lieutenant".


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