Éric Guéguen Éric Guéguen 7 novembre 2013 23:31

@ ffi :
 
Vu l’heure, je ne vais hélas pas pouvoir vous répondre aussi longuement que je le devrais peut-être.
 
Je ne pense pas que l’on puisse à ce point opposer Platon et Aristote ; il y a énormément plus de choses qui nous séparent des deux que de choses qui les séparent entre eux.
J’aime beaucoup lire Platon, c’est plus plaisant, plus drôle, plus engageant qu’Aristote. Plus littéraire aussi. Mais s’agissant de repenser la politique actuelle, le choix est vite fait. Aristote prend en compte et la diversité des caractères, et l’apprentissage personnel. Il permet une réelle reformulation de la démocratie, dont Platon ne veut même pas entendre parler. Il admet l’homme économique et les réalités de ce monde, mais en le subordonnant à l’homme politique, dans une perspective téléologique permettant d’articuler "individu" et cité.
Platon écrit des choses merveilleuses, mais vis-à-vis de l’efficience politique, il y a beaucoup moins à en dire qu’Aristote qui, comme Platon d’ailleurs, n’est décidément pas un homme "à système", comme vous le disiez. D’ailleurs, vous lui reprochez ça quand d’autres, au contraire, lui reprocheront d’avoir avili la pensée de son maître en la dissolvant dans un proto-libéralisme.
 
Bref, notre époque est tout sauf aristotélicienne. Aristote est le grand banni de l’histoire, lors même qu’il a influencé tout le monde : Bacon et Hobbes s’opposent à lui, Spinoza l’a lu sous toutes les coutures, Kant et Hegel également, Marx s’en inspire, Heidegger le déterre et Arendt le plébiscite. Les œuvres complètes de Platon sont disponibles en Pléiade ou chez Flammarion. Les œuvres complètes d’Aristote, on les attend toujours !
 
Petite remarque pour finir : je n’ai pas prétendu que Platon mettait "la vertu au rang d’un savoir qui pouvait s’acquérir". Il ne le fait surtout pas, en effet. En revanche, j’ai dit et je répète que pour lui, un homme ayant "acquis" un certain savoir était nécessairement vertueux. Socrate concevait difficilement que le savoir ne puisse pas écarter l’apprenti sage de la tentation du mal.
Quant à Dieu, il est certainement plus à l’aise dans un monde platonicien, la révélation s’y prête peut-être mieux.
Merci en tout cas de tous vos messages et de votre attention, ffi.


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