Éric Guéguen Éric Guéguen 18 septembre 2013 10:43

Bonjour Gaspard.
 
Je souscris presque à ce que vous dites. "Presque" car je m’en tiens pour ma part à la distinction opérée par Aristote entre ce qui ne peut être autrement qu’il n’est et ce qui peut différer. Ce qui est immuable peut être objet de science, pas le reste. Ceci réduit énormément ce qui est rigoureusement "scientifique" au sens qu’en donne Aristote (et la médecine, par exemple, peut difficilement en faire partie).
Mais Aristote voit tout de même plus qu’un art dans la politique qui a vocation à déceler les moyens de gouverner les hommes conformément à leur nature, éminemment variable. C’est en quelque sorte la science du détail, la science architectonique de la subtilité, s’offrant uniquement à celles et ceux qui acceptent d’y être sensibles. Il y a de l’absolu dans "ce qui peut être autrement qu’il n’est" ou "qui est tel dans la plupart des cas" (hos epi to polu en grec attique), c’est-à-dire qu’il ne peut y avoir qu’un seul mode de gouvernement qui peut convenir à un peuple particulier, charge à lui de le découvrir. Cela veut dire également qu’aucun régime ne peut prétendre à l’universalité, pas plus la démocratie qu’un autre, étant donné que chaque régime doit se conformer à la nature du peuple en question, comme chaque activité au sein de la cité doit être en conformité avec la nature de l’individu qui s’y adonne.
 
Donc, oui, la politique n’est pas une science exacte, mais c’est une "science" quand même du point de vue des Grecs, et oui certains êtres sont capables de prouesses en la matière, ce qui relève de leur génie, donc de leur nature propre ; à ce titre, on peut alors parler d’un art, ce que la tradition, de Platon à Rousseau en passant par Machiavel reconnaît en particulier dans des figures telles que Lycurgue, ou Solon pour certains, voire Moïse pour d’autres.


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