samedi 8 juin 2019 - par maQiavel

Les bobos n’existent pas !

Les bobos n'existent pas... C'est l'avis du sociologue Colin Giraud. Et voilà pourquoi.

 

Dans une perspective attentive aux relations à l’espace qu’entretiennent des groupes sociaux inégalement dotés en ressources, Colin Giraud et ses confrères récusent l’idée selon laquelle cette catégorie permet de décrire et d’expliquer le monde social. La notion de « bobos » masque a complexité des processus sociaux et son usage passe sous silence l’hétérogénéité des populations, la diversité des processus et des pratiques.

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La genèse de la catégorie de « bobos » se comprend dans le contexte de la lutte pour le monopole de la production des idées entre conservateurs et progressistes , elle est mobilisée dans les champs médiatique et politique par les premiers pour tourner en dérision le style de vie des seconds et disqualifier leurs préoccupations politiques comme les revendications liées à la redistribution sociale, à l’antiracisme, à l’écologie, au féminisme, qui sont assimilées à celles d’un groupe social urbain privilégié qui se détourneraient des enjeux contemporains et qui serait « coupé de la réalité et des difficultés du peuple ».

Finalement, la mobilisation de la catégorie de « bobos » dans les champs médiatico-poiltique permet de déplacer le débat : son usage permet de parler de niveaux de revenus et de se contenter de décrire des pratiques culturelles sans en expliciter leurs conditions sociales de production, à une focale sur les catégories socio-économiques (classes, âge, diplôme, sexe) se substitue une attention aux modes de vie supposé homogène d’individus socialement hétérogènes.

La mobilisation d’une catégorie comme celle des « bobos » témoigne avant tout d’un appauvrissement de la description et de l’explication du monde social : les modes de vie ne sont pas mis en relation avec les caractéristiques sociales des agents et l’usage de la catégorie de « bobos » se fait aux dépens de catégories plus fines comme celle de gentrificateurs pour comprendre nos sociétés contemporaines : seul 1/6ème des gentrifieurs acceptent de se définir eux-mêmes comme "bobo" , d’autres utilisent ce terme pour désigner des acteurs sociaux sans le sou comme les intermittents du spectacle.

L’usage d’une catégorie sociologiquement pauvre comme celle de « bobos » en dit plus sur les agents qui la mobilisent que sur ceux qu’elle est censée décrire.

Sources :

- Thibaud Morin, « Jean-Yves Authier, Anaïs Collet, Colin Giraud, Jean Rivière, Sylvie Tissot (dir.), Les bobos n’existent pas  »

-Brut

- innerFrench

 




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