vendredi 9 septembre 2016 - par maQiavel

Identité vs Souveraineté

Invité à l’émission « c à vous » Eric Zemmour affirme à partir de 12 min 25 sec de la vidéo mise en ligne que si la souveraineté n’était pas une question négligeable, c’est une question qui a 25 ans de retard et qu’elle est secondaire par rapport à la question identitaire. Il se justifie en expliquant qu’une république française islamique pourrait être souveraine mais ne serait plus la France.

 

 

Pour Zemmour, souhaiter recouvrer la souveraineté, est donc devenu « has been ». Notre législation écrite ailleurs, notre défense soumise à l’OTAN, notre monnaie dirigée depuis Francfort, notre budget passé sous les fourches caudines de Bruxelles, tout cela est secondaire, la priorité devant être accordée désormais à l’identité menacée.

 

On peut s’étonner du revirement de ce désormais ex-militant souverainiste qui s’est démené comme un diable dans un bénitier contre le traité de Maastricht, certains « cerveaux malades  » remettront en cause l’honnêteté de Zemmour et expliqueront ce virage idéologique par le jeu des réseaux auxquels il appartiendrait. 

 

Il ne sera pas question de cela dans cet article qui n’abordera pas les éventuelles intentions cachées du puissant faiseur d’opinion qu’est Eric Zemmour , mais qui se limitera à ce qu’il dit concrètement : comment un personnage qui a sa culture historique et politique peut-il ne pas savoir que la quête de la souveraineté est première si on souhaite préserver son identité ? Qu’abandonner cette recherche pour préserver cette dernière constitue plus qu’un leurre, une faute politique gravissime comme le souligne avec justesse le blogueur et romancier David Desgouilles dans son article « Elève Zemmour, pas d’identité sans souveraineté ». 

 

Rappelons en quelques mots ce qu’est la souveraineté : elle est cette liberté de décider qui caractérise les collectivités politiques que sont les peuples à travers le cadre de la nation et de l’Etat, c’est le pouvoir d’agir et de faire.

 

Il semble évident que reconstruire les conditions d’exercice de la souveraineté du peuple dans le cadre de la Nation est une priorité politique absolue dans une France qui a perdue nombre de prérogative régalienne, de la monnaie au budget en passant par la politique migratoire.

 

Sans la capacité d’agir et de faire, il est impossible d’affirmer sérieusement qui on est et ce que l’on veut devenir, la défense de l’identité ne devient alors qu’un folklore culturel, à l’image de ces amérindiens parqués dans leurs réserves gardant leurs plumes et leurs tentes mais dépendant d’un ordre politique qui leur échappe.

Il ne restera alors aux Français que l’affirmation identitaire narcissique et des crispations autour des tabous alimentaires et vestimentaires ainsi que sur les signes extérieurs communautaires.

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Le discours de Zemmour s’il est entendu et suivi par l’opinion française, amènera logiquement à cette situation que prédisait Michel Drac dans une analyse prospective il y’a 5 ans sur le devenir de la France : « Il y aura donc la dictature, elle ne sera probablement pas une dictature comme celle du temps jadis, les formes extérieures de la démocratie seront probablement sauvegardées, mais en réalité, les dirigeants élus ne décideront plus grand-chose (…). Pour occuper le terrain, on leur laissera le sociétal (…).La gestion sera située au niveau d’institutions technocratiques entre les mains, en pratique, du capital globalisé. C’est la poursuite des tendances actuelles, mais considérablement renforcées ».

Les Grecs dans l’antiquité savaient déjà qu’une cité qui veut conserver ses dieux et ses temples doit d’abord rester une entité libre sur la scène de l’histoire.

Non que la reconquête de souveraineté soit le seul combat politique à mener, la souveraineté ne valant que par son exercice : se dire un peuple souverain, c’est immédiatement poser la question de ce qu’il convient de faire et des décisions à prendre. Mais nous vivons un moment souvrainiste, la souveraineté est le spectre qui hante notre monde, c’est notre perte de souveraineté a permis l’émergence d’autres communautés que la communauté nationale et qui a permis la concurrence des affirmations identitaires. La crise identitaire n’en est que la conséquence.

 

 

 

Sources :

 

C à vous

 

IDDE - Institute for Direct Democracy in Europe

 

Causer : « Elève Zemmour, pas d’identité sans souveraineté »

 

RussEurope

 

Michel Drac : « Crise, le moment décisif approche »

 




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