Joe Chip Joe Chip 21 octobre 2015 11:42

MLP n’a aucune chance de passer en 2017, pour des raisons objectives et historiques. Qu’on le déplore ou non, la charge post-traumatique de la seconde guerre mondiale et le rappel de Vichy sont encore assez puissants pour tétaniser une majorité de l’électorat. A part un effondrement économique rapide, elle ne fédérera pas plus de 40% de l’électorat dans la perspective d’un second tour qui se jouera au centre, comme l’ont déjà anticipé la gauche et la droite.

En revanche, il est probable que l’élection de 2017 détruira le parti de gouvernement qui aura été éliminé au premier tour, sauf si MLP devait échouer, ce qui n’est pas totalement exclu non plus vu la dynamique interne du FN. 

Le gros problème c’est que ceux qui expliquent que la cartographie électorale droite/gauche ne correspond plus aux nouveaux clivages engendrés par la mondialisation ont raison sur le fond mais tort sur la forme. En réalité ces nouveaux clivages ont redoublé les anciens sans les effacer complètement et je ne suis pas d’accord avec l’analyse un peu facile qui consiste à mettre libéraux de gauche et libéraux de droite dans le même panier sous prétexte qu’ils seraient issus fondamentalement de la même matrice politique, ce qui est par ailleurs discutable. 

On a donc deux clivages principaux - gauche/droite et pro/anti-libéral - qui s’entremêlent sans se confondre totalement, ce qui entraîne de nombreux positionnements ambigus au sein des partis. 

Il paraît même que certains socialistes envisageraient déjà de lâcher Hollande au profit de Juppé, qui s’est toujours inscrit dans cette logique de rassemblement des libéraux "modérés" au centre, et qui bénéficie d’un courant favorable dans une partie importante de l’opinion.

A l’inverse, on sait déjà que le grand pôle souverainiste et anti-libéral souhaité par certaines n’émergera pas du fait précisément du clivage droite-gauche et du rapport ambigu des extrêmes avec le libéralisme (acceptation à gauche du libéralisme sociétal, acceptation à droite du libéralisme "darwinien"). 

Quant à l’extrême-gauche, elle n’est plus vraiment en lien avec l’époque et trop éclatée en chapelles multiples et diverses pour rester électoralement significative. 

Le vrai enjeu de cette élection va être de déterminer quel grand parti (parmi le PS, les Républicains et le FN) va être éliminé du second tour et disparaître du paysage politique français.

Si le candidat de la gauche (probablement Hollande) est éliminé au premier tour, le PS ne pourra plus survivre en tant que parti. En effet, s’ils se sont déjà trouvés en difficulté par le passé, les socialistes pouvaient encore compter sur une implantation locale forte et la garantie de retrouver une gamelle, ce qui n’est plus le cas à l’heure actuelle, ou ce qui ne le sera plus suite aux Régionales. Macron a d’ailleurs déjà intégré cette évolution en expliquant que le fait d’être un élu n’était plus déterminant dans la politique actuelle, voire rédhibitoire aux yeux mêmes de ceux qui élisent leurs "représentants" tout en les tenant pour nuls et corrompus : en voilà un au moins qui a tout compris.

Si l’UMP est éliminé, la droite unitaire ne pourra plus réaliser la synthèse politique entre les centristes progressistes pro-européens et les néo-souverainistes néo-gaullistes (un peu néo-tout en fait). Les uns rejoindront la gauche qui aura été élue au centre et les autres se rallieront au FN ou iront mourir politiquement dans l’interstice idéologique qui sépare encore la droite du FN. 

Quant au FN, personne ne semble envisager désormais son élimination du seconde tour, qui me paraît pourtant un scénario probable en raison de la crise politique qui agite le parti et du clivage interne qui oppose les natio-identitaristes aux souverainistes sociaux. Les premiers acceptent en réalité l’euro et le libéralisme économique, injustices sociales comprises (qui de leur point de vue ne font que sanctionner et traduire les inégalités naturelles, et sont donc non seulement légitimes mais souhaitables). Les seconds ont une lecture de classe et ne partagent pas les lubies sociétales des conservateurs. Une défaite au premier tour réactiverait aussitôt les pulsions groupuscularistes de l’extrême-droite et aurait sans doute pour conséquence de faire exploser le parti. On verrait alors la vie politique française se recomposer à l’américaine autour de deux partis majoritaires, avec le PS à la place des démocrates et les Républicains à la place des... Républicains 


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