Kreis : Ne pas croire la version officielle du 11-Septembre n’est pas conspirationniste
Entre le 9 et le 15 août 2012, Mediapart publie une série d'enquêtes sur les théories du complot. Voici les trois entretiens vidéo actuellement disponibles gratuitement.
1. Entretien avec l’historien Emmanuel Kreis, docteur de l’École Pratique des Hautes Études (section sciences religieuses), spécialiste du mythe du « complot judéo-maçonnique ». A partir de la 29e minute, il tient des propos fort intéressants, qui vont soulager tous ceux qui doutent ou ne croient pas la version officielle du 11-Septembre ; ils ne sont pas des théoriciens du complot (sauf s’ils tissent des liens improbables avec d’autres événements lointains) et les attaques qu’ils subissent de la part des journalistes sont absolument injustifiées :
"Ce qui est nouveau, c’est que les théories du complot sont, depuis une période extrêmement récente, reconnues, on se penche sur ces questions-là. Généralement, elles sont reconnues et attaquées extrêmement vigoureusement par des scientifiques ou des journalistes, etc. Généralement ces attaques regroupent bien autre chose que des théories du complot au sens strict. On vient de parler du 11-Septembre, le 11-Septembre n’est en soi rien d’une théorie du complot. Et finalement, chercher des réelles théories du complot, c’est-à-dire au sens étroit, comme je l’ai dit au début ça doit dépasser la rationalité temporelle et spatiale, ça doit entrer dans une résonance providentialiste ou post-providentialiste. Si vous dites qu’aucun avion ne s’est écrasé sur le Pentagone, vous niez un événement historique, mais ce n’est pas, à proprement parler, une théorie du complot. Même si vous dites que ce sont les Etats-Unis qui sont à l’origine des attentats, vous émettez une théorie recevable, irrecevable, ce n’est pas à moi de me prononcer là-dessus, mais enfin... alors oui il y a quelque chose qui est caché derrière un événement, bon, mais que quelque chose soit caché derrière un événement n’en fait pas une théorie du complot. Pour commencer à rendre ces théories, ces idées, ces hypothèses de complots, ces réflexions sur d’éventuels complots... des théories du complot, il faut une structure un peu plus dense, c’est-à-dire que le 11-Septembre répond à la Révolution française, que c’est en relation avec les Illuminés de Bavière, la conspiration juive, que tout ça [s’inscrit] dans un sens historique donné.
Ce n’est donc pas les théories du complot qui évoluent, mais le regard qu’on leur porte, donc des attaques extrêmement violentes, sur, non seulement les théories du complot proprement dites, mais aussi un ensemble de doutes, d’hypothèses du complot, de réflexions sur le complot, qui se retrouvent intégrées finalement dans une dénonciation globale. Cela fait depuis le 11-Septembre que ces choses prennent une réelle dimension importante, médiatique, qui touche largement les gens. Les effets produits ne sont pas encore forcément faciles à analyser, à palper, mais il est évident que ça va avoir des effets, ne serait-ce qu’un simple effet pervers, qui est de faire que des gens qui se posent simplement des questions, en étant attaqués extrêmement fortement sur des questions qui sont bien souvent même légitimes - enfin je veux dire le fait de se poser des questions sur les attentats du 11-Septembre et la version officielle produite par le gouvernement américain n’est pas illégitime - ces gens donc, se posant des questions, vont être renvoyés finalement à une image de conspirationnistes, et, du coup, on commence à avoir un élargissement de l’impact de ces théories du complot dans des milieux qui, jusqu’alors, n’étaient pas particulièrement touchés par ces théories, et finalement ces gens vont dériver vers toute autre chose. Donc qu’est-ce que cela peut produire, qu’est-ce que cela peut donner, est-ce que cela va enrichir les théories du complot, va les massifier ? Je n’en sais rien, mais en tout cas c’est quelque chose, à mon avis, sur lequel on ne réfléchit pas assez, et qui peut avoir des conséquences à la fois sur les théories du complot, mais également sur les sociétés."
2. Entretien avec Loïc Nicolas, co-fondateur du Groupe de recherche en Rhétorique et en Argumentation Linguistique de l’Université Libre de Bruxelles.
3. Entretien avec Miguel Chueca. Maître de conférences en langue et civilisation hispanique à l’Université de Paris 10-Nanterre, Miguel Chueca a coordonné le n° 47 de la Revue Agone (janvier 2012) consacrée aux théories du complot.
A partir de 3’30 : "Souvent, quand on défend une théorie du complot particulière, on est accusé la plupart du temps de faire du conspirationnisme, je pense que ce sont deux choses différentes. Le fait de défendre une théorie du complot n’est pas en soi le signe qu’on est un conspirationniste, je pense que souvent les gens mélangent les choses (...). On a tous notre théorie du complot, et ça c’est parce qu’au fond les théories du complot reposent souvent sur des faits, des questions, elles mettent le doigt sur des absences, sur ce qu’on appelle souvent les trous noirs, et parfois elles peuvent paraître assez convaincantes, on peut y adhérer, sans être pour autant soupçonné d’être un conspirationniste".